Antiostéoporotiques15 cas pratiques

Réservé aux abonnés
Publié le 3 octobre 2009 | modifié le 30 août 2025
Mettre en favori

1-effets indésirables

« Est-ce la grippe A ? »

Trame et cellules osseuses

Yvette B. est une femme de 71 ans, petite, mince et à l’allure voûtée. Elle marche avec une canne depuis une chute, l’an dernier, qui s’est soldée par une fracture de l’épaule. Suite à cet épisode, son médecin généraliste a initié un traitement par Fosamax (alendronate). Face à la complexité des modalités de prise (strictement à jeun en restant debout après la prise…), Mme B. lui a récemment demandé s’il n’existait pas un traitement plus simple. Il y a quinze jours, suite à sa consultation, elle s’est présentée avec une nouvelle prescription mentionnant : « Aclasta (zolédronate), une injection par an à réaliser par IDE, Cacit vitamine D3, 1 sachet par jour ». Aujourd’hui, la fille de Mme B. se rend à la pharmacie pour demander conseil : sa mère ne se sent pas bien, elle a 39 °C de fièvre depuis hier et souffre de douleurs articulaires et musculaires, de frissons et de maux de tête. Elle se demande si elle n’aurait pas attrapé cette fameuse grippe A dont tout le monde parle…

Qu’en pense le pharmacien ?

Une fièvre élevée, accompagnée de myalgies et d’arthralgies fait immédiatement penser à des symptômes grippaux, surtout en cette période de circulation du virus A(H1N1). Toutefois, Aclasta peut aussi entraîner un syndrome pseudo-grippal dans les jours qui suivent l’injection.

Analyse du cas

Aclasta est un bisphosphonate administré annuellement qui entraîne un certain nombre d’effets indésirables. Dans les 3 jours suivant l’injection, peut notamment apparaître un syndrome pseudo-grippal (12 % des cas) associant fièvre, frissons, asthénie, douleurs type myalgies, arthralgies et/ou céphalées. L’incidence de cet effet indésirable peut être réduite par l’administration de paracétamol ou d’ibuprofène peu après l’injection. Ce syndrome pseudo-grippal n’existe qu’avec les bisphosphonates injectables et sa fréquence décroît au fil des administrations. Les autres effets indésirables décrits pour cette classe médicamenteuse (douleurs ostéoarticulaires ou musculaires, céphalées…) concernent tous les bisphosphonates, quelle que soit leur voie d’administration.

Attitude à adopter

Dans le cas présent, l’injection d’Aclasta a eu lieu la veille au matin et les premiers signes sont apparus dans les heures qui ont suivi. Ce délai évoque une possible réaction à la perfusion. Si les symptômes sont effectivement dus à Aclasta, ils disparaîtront probablement avec l’administration d’1 g de paracétamol 3 fois par jour pendant 2 ou 3 jours. Le paracétamol est davantage recommandé que l’ibuprofène chez cette patiente âgée. Toutefois, dans le contexte de circulation de la grippe A, il est préférable que madame B. contacte son médecin. En attendant, elle doit rester chez elle, éviter les contacts avec ses proches (port d’un masque chirurgical) et prendre du paracétamol.

2-effets indésirables

« J’ai des crampes dans les jambes »

Evolution de la masse osseuse au cours de la vie

Publicité

Madame C. est sortie de son dernier rendez-vous chez le rhumatologue avec une nouvelle prescription établie pour 6 mois : « Après prélèvements sanguins, réaliser une injection quotidienne de Forsteo 20 mg (tériparatide) en stylo. Aiguilles 5 mm et coton hydrophile ». Le pharmacien a dispensé les produits avec tous les conseils d’usage concernant l’utilisation du médicament, la conservation au froid du stylo et les modalités d’injection en s’appuyant sur le manuel d’utilisation du stylo fourni avec la boîte. Après un mois et demi de traitement, madame C. se présente à l’officine en expliquant qu’elle souffre depuis quelques jours de douleurs dans les muscles des jambes, parfois très intenses, comme des crampes. De plus, les injections quotidiennes sont contraignantes et lui provoquent des rougeurs sur les cuisses et des démangeaisons. Y a-t-il une solution ?

Qu’en pense le pharmacien ?

Le traitement par Forsteo (tériparatide) induit fréquemment des douleurs dans les membres. Elles sont parfois décrites comme des crampes et peuvent, plus rarement, associer des arthralgies et des myalgies.

Analyse du cas

Le tériparatide est la séquence active de la parathormone humaine endogène, principal régulateur du métabolisme phosphocalcique au niveau osseux et rénal. Une parathormone recombinante, Preotact, devrait prochainement être commercialisée, nécessitant également une injection quotidienne.

Chez les femmes ménopausées, le traitement conduit à une réduction significative de l’incidence des fractures vertébrales et périphériques, mais pas des fractures de la hanche. Les indications du tériparatide sont réduites au traitement de l’ostéoporose des patients (femmes et hommes) à risque élevé de fractures, avec au moins 2 fractures vertébrales. Le traitement est poursuivi pendant 18 mois au maximum au cours de la vie d’un patient. La survenue d’effets indésirables est fréquente, avec le plus souvent des nausées, des douleurs dans les membres, des céphalées, des sensations vertigineuses… Des cas de crampes ou de douleurs dorsales apparaissent parfois dans les minutes suivant l’injection. S’ils sont permanents ou trop intenses, ces effets peuvent nécessiter l’arrêt du traitement, ce n’est en revanche pas le cas des effets locaux (rougeurs démangeaisons), la plupart du temps bénins.

Attitude à adopter

Madame C. a exprimé l’aspect contraignant du traitement, aussi le pharmacien lui suggère-t-il de contacter rapidement son médecin pour réévaluer sa prescription. La parathormone est prescrite chez des patients souffrant de formes particulièrement sévères d’ostéoporose. L’observance est primordiale. Si la parathormone est maintenue et que les douleurs de madame C. ne sont pas permanentes, elle peut prendre du paracétamol pour les soulager. Si cela s’avérait insuffisant, un changement de molécule devrait, quoi qu’il arrive, être envisagé par le médecin.

3-effets indésirables

« Ma mère a des remontées acides »

Un jeune homme entre à l’officine et se dirige vers la zone des médicaments en libre accès. Il apporte au comptoir une boîte de Maalox en sachets. Il précise que ce n’est pas pour lui mais pour sa mère qui se plaint de remontées acides depuis deux jours.

Quelle doit être la réaction du pharmacien ?

La dispensation d’antiacides est banalisée. Bien que ce soit difficile en pratique, il est important de s’assurer de la pertinence du choix du médicament et de l’éventuelle existence de traitements associés. Interrogé, le jeune homme explique que sa mère prend un nouveau traitement contre l’ostéoporose.

Analyse du cas

Des oesophagites, des ulcères et érosions oesophagiens, rarement suivis de sténoses, ont été rapportés chez des patientes traitées par des médicaments courants de l’ostéoporose : les bisphosphonates. Dans certains cas, ces réactions sont sévères et nécessitent l’hospitalisation. Il convient donc d’être vigilant quant à l’apparition de tout signe ou symptôme digestif chez les patients traités par ces molécules. En effet, la poursuite du traitement augmente le risque d’aggravation de ces troubles oesophagiens. Il est donc conseillé de consulter en cas de dysphagie, de douleur rétrosternale, d’apparition ou d’aggravation de brûlures rétrosternales. Les prises de bisphosphonates pourront être suspendues.

Attitude à adopter

En l’absence de la patiente, il est difficile de savoir quel est son traitement et si les modalités de prise sont comprises et suivies. Soit la patiente a la possibilité de se présenter elle-même au comptoir, expliquer ce qu’elle ressent et les circonstances d’apparition de ses troubles, soit elle ne peut pas se déplacer, auquel cas le pharmacien peut décider de la contacter par téléphone. Si les troubles lui paraissent effectivement liés à la prise d’un bisphosphonate, il sera préférable de contacter le prescripteur.

4-effets indésirables

« J’ai à nouveau des bouffées de chaleur »

Madame S. se présente pour le renouvellement de son ordonnance : Spiriva, Bécotide, Di-Antalvic, Evista (raloxifène) et calcium. Elle explique qu’elle ne prendra pas l’Evista car il lui en reste. Lors de sa ménopause, il y a 5 ou 6 ans, elle a souffert de bouffées de chaleur. Celles-ci avaient quasiment disparu. Depuis 6 mois qu’elle prend Evista pour l’ostéoporose, ça recommence. Elle ne le supporte plus.

Evista est-il en cause ?

Le raloxifène (Evista) peut provoquer des bouffées de chaleur semblables à celles ressenties lors de la ménopause. Madame S. en a-t-elle parlé au médecin ?

Analyse du cas

Le raloxifène agit comme agoniste oestrogène sur le tissu osseux. Il réduit significativement l’incidence des fractures vertébrales (pas de la hanche) chez la femme ménopausée depuis moins de 10 ans à risque d’ostéoporose. Dans près de 25 % des cas, cette molécule entraîne des phénomènes de vasodilatation intense (bouffées de chaleur) qui peuvent parfois être invalidants du fait de leur fréquence et/ou intensité. La seule solution est alors de modifier le traitement.

Attitude à adopter

En discutant avec la patiente, le pharmacien s’aperçoit qu’elle n’est pas convaincue de l’efficacité du traitement de l’ostéoporose, qu’elle ne le prend pas régulièrement et qu’elle n’est pas motivée pour que cela s’améliore. Il lui explique l’intérêt du traitement pour la prévention des fractures vertébrales et évoque les alternatives médicamenteuses à Evista qu’elle tolère mal. Il doit la convaincre d’en parler au médecin lors de sa prochaine consultation. Le pharmacien interroge par ailleurs madame S. sur un éventuel tabagisme, qui serait délétère non seulement pour sa BPCO mais aussi pour son ostéoporose (à noter dans la fiche de la patiente). Le statut des patients vis-à-vis du tabac est important à connaître pour un grand nombre de pathologies chroniques.

5-effets indésirables

« Il me reste des sachets de calcium… »

Madame P. est traitée depuis plusieurs années pour une hypertension artérielle. Il y a 6 mois, suite à une fracture, son médecin lui a prescrit Actonel Combi (risédronate en comprimés, calcium et vitamine D en sachets). Aujourd’hui, lors de son renouvellement, elle explique au pharmacien qu’elle n’a plus de comprimés mais qu’il lui reste des sachets. Comme tout est contenu dans une même boîte, elle ne sait pas comment faire. Au cours de la discussion, elle précise qu’elle ne prend plus les sachets car ils la constipent, lui donnent des nausées et des ballonnements. De plus, elle trouve que la forme sachets n’est pas pratique.

Est-ce étonnant ?

Non, quelles que soient les formes galéniques des spécialités à base de calcium, la mauvaise tolérance digestive conduit fréquemment à une inobservance.

Analyse du cas

Les besoins calciques sont particulièrement importants (1 500 mg/j) chez la femme après la ménopause et chez l’homme de plus de 50 ans. Notons en outre que les régimes hyperprotéinés ou riches en sel induisent une perte de calcium. Chez ces patients, une supplémentation en calcium et vitamine D s’avère souvent nécessaire pour prévenir ou traiter l’ostéoporose et est de ce fait quasi systématiquement prescrite. En pratique, pour ne pas réduire leur biodisponibilité déjà faible, les suppléments calciques doivent être pris à distance des bisphosphonates ou du ranélate de strontium (Protelos) et en dehors des repas car il existe certaines interactions alimentaires : aliments riches en acide oxalique (épinards, cacao, thé…) et en acide phytique (céréales complètes, légumes secs, chocolat…). Toutefois, la prise de calcium à distance d’un repas pose des problèmes de tolérance digestive (nausées, troubles du transit). Pour les éviter, la supplémentation calcique est recommandée en 2 prises par jour. Une augmentation progressive de la posologie sur quelques jours peut être conseillée et la forme galénique doit être adaptée au patient.

Attitude à adopter

Une solution doit impérativement être trouvée pour que la patiente prenne son calcium. Les boîtes d’Actonel Combi contiennent des sachets de granulés effervescents dosés à 1 000 mg de calcium (une seule prise par jour sauf le jour de prise du bisphosphonate). La mauvaise tolérance digestive (nausées, ballonnements) dont madame P. se plaint, souvent dose-dépendante, est favorisée par une administration hors prise alimentaire. Le pharmacien lui conseille d’évoquer ce problème avec son médecin lors de la prochaine consultation. Celui-ci pourra décider de lui prescrire des comprimés à croquer ou à sucer à 500 mg pour limiter les nausées. La posologie sera de un cp par jour, pour favoriser l’observance, sous réserve d’augmenter les apports calciques alimentaires (produits laitiers, eaux minérales riches en calcium : Hépar, Contrex), ou de 2 cp par jour. En attendant, le pharmacien peut proposer à madame P. de prendre ses sachets au moment des repas, au risque de diminuer l’absorption du calcium. Par ailleurs, il s’assure du fait qu’aucun autre médicament consommé par la patiente ne puisse majorer les effets digestifs du calcium (codéine, molécule à effet atropinique…).

Evaluation du risque de fractures

– L’ostéodensitométrie est une méthode non invasive de mesure de la densité minérale osseuse (DMO). La technologie de référence utilise les rayons X, sur 2 sites : rachis lombaire et col du fémur. Le résultat est exprimé en T-score, représentant la différence entre la DMO du patient et la valeur moyenne d’un jeune adulte de même sexe.

– Quatre stades sont définis :

– Le diagnostic d’ostéoporose ne permet pas à lui seul de définir le seuil d’intervention thérapeutique. S’il est vrai qu’une ostéoporose avérée augmente le risque de fractures, nombre de fractures se produisent chez des personnes non ostéoporotiques, du fait d’une architecture défaillante du tissu osseux, en dépit d’une DMO correcte.

– Le Frax est un nouvel outil de calcul mis au point par l’OMS afin de déterminer le risque, pour un patient donné, d’avoir une fracture liée à l’ostéoporose dans les 10 ans. Il prend en compte douze critères dont l’âge, le poids, le sexe, la DMO, les antécédents de fracture, la consommation de tabac, d’alcool, de glucocorticoïdes…

6-effets indésirables

Abcès dentaire sous Actonel

Madame L. sort du cabinet dentaire avec une ordonnance de Rodogyl, Propofan et Eludril. Elle a mal à une molaire et la radio a mis en évidence un abcès sous une couronne, avec une racine très abîmée. Dans une quinzaine de jours, lorsque l’abcès aura été éliminé par le traitement antibiotique, le dentiste doit revoir la patiente pour extraire cette dent. Il envisage la pose d’un implant. Madame L. a, de plus, été interrogée sur d’éventuels traitements en cours. Le dentiste lui recommande d’arrêter Actonel (risédronate) le temps que durent les soins. La patiente est très étonnée, elle demande si c’est normal.L’arrêt d’Actonel est-il pertinent ?

Oui, les bisphosphonates utilisés comme antiostéoporotiques sont susceptibles d’entraîner, dans de très rares cas, une ostéonécrose des mâchoires pouvant justifier la suspension du traitement pendant des soins dentaires invasifs.

Analyse du cas

– Une ostéonécrose de la mâchoire, généralement associée à une extraction dentaire et/ou à une infection locale, a été rapportée chez des patients atteints de cancer et recevant des traitements médicamenteux comprenant des bisphosphonates par voie intraveineuse. Elle a été plus rarement rapportée chez des patients atteints d’ostéoporose traités par bisphosphonates per os. Le risque augmenterait vraisemblablement avec l’ancienneté du traitement. Bien que rare, cet effet est toutefois grave car il n’existe pas de traitement. En conséquence, chez un patient sous bisphosphonate injectable, toute chirurgie buccale, y compris la pose d’un implant, est contre-indiquée et toute intervention dentaire invasive devrait être évitée. Toutefois, en cas de nécessité absolue, si une intervention doit avoir lieu, il n’existe pas de données disponibles prouvant qu’une interruption du traitement réduise le risque d’ostéonécrose.

– Avant l’instauration d’un traitement par bisphosphonates per os, un examen dentaire ainsi que des soins préventifs appropriés doivent être envisagés chez les patients présentant des facteurs de risque associés (cancer, chimiothérapie, radiothérapie, corticothérapie, mauvaise hygiène buccale…). Tout foyer infectieux doit impérativement être éliminé. En cours de traitement, le rapport bénéfice/risque doit être évalué individuellement par le médecin en tenant compte de l’état clinique du patient. Chez les patients à risque, les recommandations actuelles suggèrent, après avis médical, d’arrêter le traitement trois mois avant et de le reprendre trois mois après toute chirurgie buccale programmée. Il n’y a pas de contre-indication formelle à la pose d’implant. Les dentistes sont informés de ce risque.

Attitude à adopter

Le pharmacien rassure madame L. : la suspension transitoire du traitement par Actonel est une mesure de précaution qui ne majore pas le risque d’ostéoporose dans la mesure où l’arrêt reste bref. La patiente pourra reprendre son traitement normalement à l’issue des soins dentaires. Si la pose d’un implant est envisagée, la suspension du traitement peut être de plus longue durée. En revanche, madame L. doit poursuivre sa supplémentation calcique pendant cette période. Si cela n’a pas été fait par le dentiste, elle doit par ailleurs informer son médecin traitant de la suspension du traitement par bisphosphonate.

pharmacologie

Stratégie de traitement de l’ostéoporose

La prévention et le traitement de l’ostéoporose visent à réduire la fréquence des fractures symptomatiques.

Les fractures ostéoporotiques sont le signe d’un stade grave et déjà avancé de la maladie en termes de morbimortalité, d’altération de la qualité de vie et de coût, représentant dès lors un véritable problème de santé publique. La majorité des fractures survient toutefois chez des femmes ménopausées sans ostéoporose avancée (densité minérale osseuse correcte mais microarchitecture de l’os fragilisée).

Objectif du traitement

L’objectif d’un traitement antiostéoporotique est de limiter ou de compenser la perte osseuse afin de réduire les fractures par fragilité dans les cinq à dix ans suivant son instauration.

Choix de la stratégie thérapeutique

La stratégie de traitement est fondée sur la présence ou non de fractures et sur la sévérité de l’ostéoporose. Parmi les différentes classes d’antiostéoporotiques, le choix sera fait en fonction de :

– la densitométrie osseuse,

– la prédominance rachidienne ou périphérique de l’ostéoporose,

– l’âge du ou de la patiente,

– le nombre de fractures antérieures,

– les effets indésirables de chaque molécule,

– les contre-indications,

– en cas de traitements concomitants, les interactions médicamenteuses doivent également être prises en compte.

Comment agissent les antiostéoporotiques ?

Le tissu osseux est en constant remaniement. Deux types de cellules agissent dans ce sens : les ostéoblastes, responsables de la formation de l’os par sécrétion de collagène et d’hydroxyapatite, et les ostéoclastes qui détruisent la matrice osseuse, en sécrétant des enzymes protéolytiques.

– Les bisphosphonates inhibent la résorption osseuse par une action essentiellement antiostéoclastique.

– Le raloxifène inhibe également l’activité ostéoclastique par une action agoniste sur les récepteurs estrogènes de l’os.

– Le tériparatide stimule l’activité ostéoblastique, favorise l’absorption intestinale du calcium et diminue son excrétion rénale.

– Le strontium favorise l’ostéoformation par réplication des ostéoblastes et ralentit l’activité ostéoclastique.

Quelle que soit la molécule choisie, une supplémentation vitaminocalcique est souvent associée.

pharmacologie

Traitement de l’ostéoporose

traitements préventifs

La prévention de l’ostéoporose repose sur le respect de mesures hygiénodiététiques tout au long de la vie. Le capital osseux se constitue essentiellement avant 20 ans. Un apport alimentaire suffisant en calcium et l’exercice physique pendant l’enfance optimisent le capital osseux. Une bonne hygiène de vie limite certains facteurs de risque (tabac, alcool en excès, sédentarité, régimes amincissants ou pauvres en calcium, ensoleillement insuffisant…).

Les mesures médicamenteuses occupent une maigre place : le traitement hormonal substitutif de la ménopause doit être réévalué régulièrement et sa durée limitée du fait d’effets cardiovasculaires et carcinogènes potentiels. Les bisphosphonates ou le raloxifène parfois utilisés chez des femmes à risque élevé d’ostéoporose ne sont pas remboursés dans l’indication préventive.

L’intérêt d’un traitement en prévention primaire des fractures n’est pas démontré.

Les bisphosphonates inhibent la résorption osseuse.

traitements curatifs

Bisphosphonates

Cette classe médicamenteuse représentée par l’étidronate (peu prescrit du fait d’une efficacité très inférieure), l’alendronate, le risédronate, l’ibandronate et l’acide zolédronique constitue aujourd’hui le traitement de référence.

Mécanisme d’action

Analogues des pyrophosphates inorganiques, les bisphosphonates ont une forte affinité pour le tissu osseux. Ils diminuent le remodelage et inhibent la résorption osseuse par une activité antiostéoclastique forte. Leur efficacité est démontrée par une augmentation de la densité osseuse de l’ordre de 5 %, le maintien des qualités mécaniques de l’os et une réduction de l’incidence des tassements vertébraux et/ou fractures vertébrales, voire des fractures de la hanche (alendronate et risédronate seulement).

Biodisponibilité per os très faible (< 1 % même en l’absence d’aliments)

Indications

– Traitement de l’ostéoporose postménopausique.

– Traitement de l’ostéoporose masculine : alendronate 10 mg, risédronate 35 mg, acide zolédronique.

– Prévention de l’ostéoporose postménopausique chez la femme à risque élevé : risédronate 5 mg.

– Prévention (étidronate) et traitement (acide zolédronique ou risédronate 5 mg) de l’ostéoporose cortisonique chez l’homme ou la femme à risque élevé de fracture.

Modalités de prise

Voie orale

– Prise d’un comprimé à jeun, en position assise ou debout avec un grand verre d’eau faiblement minéralisée (ne pas sucer, croquer ou mâcher le comprimé).

Ne pas avaler de nourriture ou de liquide dans la demi-heure (alendronate et risédronate), l’heure (ibandronate) ou les 2 heures (étidronate) qui suivent.

Ne pas s’allonger dans la demi-heure ou l’heure (ibandronate) qui suit (lésions oesophagiennes, potentiellement sévères).

– Différents schémas de prise selon les molécules :

– Etidronate 400 mg : schéma séquentiel avec 1 cp par jour pendant 14 jours puis arrêt pendant 2 mois et demi.

– Alendronate 10 mg et risédronate 5 mg : 1 cp par jour (peu prescrit).

– Alendronate 70 mg et risédronate 35 mg : 1 cp par semaine.

– Risédronate 75 mg: 1 cp 2 jours de suite par mois.

– Ibandronate : 1 cp par mois.

Voie injectable

– Ibandronate : 1 inj. IV trimestrielle en 15 à 30 s.

– Acide zolédronique : 1 perfusion IV/an en 15 min.

Principaux effets indésirables per os

– Aphtes, irritations, ulcères voire perforations oesophagiennes (respecter les modalités de prise).

– Troubles digestifs : nausées, dysphagies, douleurs abdominales, constipation, diarrhées.

– Céphalées.

– Douleurs ostéoarticulaires et musculaires (crampes).

– Ostéonécrose de la mâchoire (surtout avec la voie injectable, chez les patients à risque, très rare sinon) : surveiller l’hygiène buccale avant et pendant le traitement.

Contre-indications absolues

– Impossibilité de respecter les modalités de prise.

– Insuffisance rénale sévère.

– Maladie de l’oesophage (formes orales).

– Hypocalcémie (sauf étidronate).

– Grossesse (risédronate) et allaitement (risédronate et étidronate).

– Ostéomalacie patente (étidronate).

Le raloxifène inhibe la résorption osseuse par agonisme estrogène.

Raloxifène

Mécanisme d’action

Agent non hormonal agissant sur les récepteurs oestrogènes, à la fois comme agoniste (os et métabolisme) et antagoniste (seins et utérus). Son efficacité est démontrée sur l’augmentation de la densité osseuse au niveau vertébral et la réduction des récidives de fractures vertébrales.

Indications

Prévention et traitement de l’ostéoporose chez les femmes ménopausées.

Modalités de prise

1 cp/jour. Prise indifférente par rapport aux repas.

Principaux effets indésirables

– Bouffées de chaleur.

– Augmentation du risque thromboembolique.

– Crampes dans les membres inférieurs.

– Syndrome grippal.

Contre-indications absolues

– Femmes non ménopausées.

– Insuffisance hépatique ou rénale sévère.

– Antécédents de maladie thrombotique, immobilisation prolongée.

– Antécédents de cancers gynécologiques.

Le tériparatide favorise la formation osseuse en stimulant l’activité ostéoblastique.

Tériparatide

Mécanisme d’action

Cette molécule est la séquence active de la parathormone, hypercalcémiante. Elle module la formation osseuse par effet direct sur les ostéoblastes, augmente l’absorption intestinale de calcium et diminue son excrétion rénale.

Indications

– Traitement de l’ostéoporose chez les patients à risque élevé de fracture.

– Traitement de l’ostéoporose cortisonique chez des patients à risque élevé de fracture.

Modalités de prise

Administration quotidienne par voie sous-cutanée de 20 mg (80 ml) au niveau de l’abdomen ou de la cuisse (18 mois au maximum de traitement par patient).

Principaux effets indésirables

Fréquents : douleurs dans les membres, crampes, vertiges, céphalées, nausées, anémie, hypercholestérolémie, palpitations, hypotension, hernie hiatale, dyspnée, fatigue, dépression.

Contre-indications absolues

– Hypercalcémie.

– Insuffisance rénale sévère.

– Tumeur ou métastases osseuses.

– Grossesse et allaitement.

NB : Forsteo (tériparatide) est un médicament d’exception.

Le ranélate de strontium s’oppose à la résorption et stimule la formation osseuse

Ranélate de strontium

Mécanisme d’action

Cation divalent proche du calcium, le strontium rééquilibre le métabolisme osseux en faveur de la formation :

– il augmente la formation osseuse en stimulant la réplication des précurseurs ostéoblastiques et la synthèse de collagène,

– il diminue la résorption osseuse en diminuant la différenciation des ostéoclastes.

Indication

Traitement de l’ostéoporose postménopausique.

Modalités de prise

1 sachet au coucher dans 1 verre d’eau, en l’absence de laitages, de préférence au moins 2 heures après le dîner.

Principaux effets indésirables

– Fréquents : nausées, diarrhées, céphalées, dermatite, eczéma.

– Rares cas d’hypersensibilité (syndrome DRESS).

Apport vitaminocalcique

– Calcium sous forme de carbonate, citrate ou phosphate tricalcique.

– Vitamine D2 (ergocalciférol) ou D3 (cholécalciférol) : augmente l’absorption intestinale de calcium et sa fixation sur le tissu osseux.

Indications

Correction des carences, en prévention de l’ostéoporose.

Association aux traitements spécifiques de l’ostéoporose chez les patients carencés ou à risque de carence.

Modalités de prise

– L’apport quotidien recommandé est de 1 g de sels calciques et 800 UI de vitamine D.

– Le calcium doit être pris en dehors des repas pour améliorer sa biodisponibilité, mais cela diminue la tolérance digestive.

Principaux effets indésirables

Calcium : nausées, diarrhées, constipation, flatulences, douleurs abdominales.

Traitement hormonal substitutif de la ménopause

Efficacité modeste sur la prévention des fractures. L’utilisation de ce type de traitement comme antiostéoporotique est exceptionnelle vu ses potentiels effets indésirables cardiovasculaires et carcinogènes dans le cadre de prises prolongées.

7-effets indésirables

Démangeaisons sous Protelos

Madame N. a 64 ans et souffre de douleurs lombaires consécutives à un tassement vertébral. Des radios mettant en évidence plusieurs fractures vertébrales ont été réalisées. Aussi, depuis un mois la patiente est sous Protelos (ranélate de strontium) avec une supplémentation calcique. Aujourd’hui, elle se présente à l’officine et demande une pommade pour des démangeaisons. Depuis hier, elle a le corps recouvert de boutons qui la démangent. Elle pense faire une allergie, mais à quoi ? Elle n’a pas d’autres symptômes.

Que conseiller à Mme N. ?

Une éruption cutanée sous Protelos doit conduire à un arrêt du traitement et à une consultation médicale (Afssaps).

Analyse du cas

Des cas de syndrome d’hypersensibilité médicamenteuse DRESS (« drug rash with eosinophilia and systemic symptoms ») ont été rapportés dans les 3 à 6 semaines suivant le début du traitement par Protelos (13 cas notifiés en France entre 2005 et 2007 dont 2 décès). Cette réaction allergique grave se manifeste par une éruption cutanée parfois associée à de la fièvre, une augmentation du volume des ganglions et des effets pulmonaires, hépatiques ou rénaux. L’arrêt définitif du médicament est impératif et une corticothérapie permet souvent une évolution favorable.

Attitude à adopter

Le syndrome DRESS est rare mais potentiellement gravissime. La procédure doit être respectée sans affoler madame N. Le pharmacien peut lui proposer de contacter le médecin afin qu’il confirme la nécessité l’arrêt immédiat du traitement. S’il n’est pas joignable, il est prudent de suspendre le traitement et de conseiller une consultation médicale rapide. L’issue la plus logique serait la prescription d’un autre antiostéoporotique. En cas de changement de traitement, veiller à notifier cet épisode dans le dossier de madame N. : Protelos lui sera définitivement contre-indiqué !

1-interactions médicamenteuses

Des prises compliquées

Madame R. a suivi un traitement par Fosamax 70 (alendronate) et Cacit D. Il y a 3 mois, en raison de problèmes d’observance, son médecin lui a prescrit Bonviva (ibandronate) en prise mensuelle. Le pharmacien avait alors noté ce changement dans la fiche patient. Ce matin, madame R. vient renouveler son traitement. Interrogée, elle dit prendre Bonviva un lundi sur quatre, le matin, avec 2 grands verres d’eau du robinet, quelle ne trouve pas bonne. Un ami lui a parlé d’Hépar, riche en calcium.

Qu’en penser ?

La prise de Bonviva (ibandronate) avec une eau riche en calcium est fortement déconseillée. Par ailleurs, elle ne doit pas avoir lieu toutes les quatre semaines mais le même jour chaque mois.

Analyse du cas

Comme tous les bisphosphonates, l’ibandronate doit être administré à jeun avec une eau faiblement minéralisée (eau du robinet). La biodisponibilité des bisphosphonates est très faible (inférieure à 1 %) et la présence de calcium la diminue fortement, au risque d’annuler les effets de la molécule (interaction alimentaire). Il est impératif de respecter un jeûne de 6 heures avant la prise de Bonviva. Le comprimé doit être avalé en position debout ou assise, sans le sucer ni le croquer. Garder le buste droit dans l’heure qui suit la prise sans boire ni s’alimenter. Par ailleurs, le comprimé doit systématiquement être pris le même jour du mois, chaque mois et non pas le même jour de la semaine toutes les quatre semaines.

Attitude adoptée

Les modalités de prise sont réexpliquées en détail à madame R. Le pharmacien insiste sur leur importance pour la bonne efficacité du traitement et son confort. Pour faciliter l’observance, la boîte de Bonviva contient des autocollants à placer comme mémo sur un calendrier.

2-interactions médicamenteuses

Du LansoØl pour madame U.

Madame U., 62 ans, a été hospitalisée suite à une fracture du poignet. Un examen ostéodensitométrique a mis en évidence une ostéopénie franche. Ce soir, elle présente à la pharmacie une ordonnance hospitalière de Fosamax 70 (alendronate) et Orocal Vitamine D3. Elle en profite pour renouveler son ordonnance habituelle : un traitement antihypertenseur, suivi depuis 3 ans, et des antalgiques pour ses douleurs articulaires. Enfin, elle demande un pot de LansoØl (huile de paraffine).

Le pharmacien peut-il accéder à sa demande ?

Un traitement ponctuel avec de l’huile de paraffine ne pose pas de problème avec le traitement de madame U. Il est toutefois nécessaire de vérifier la fréquence d’utilisation de ce laxatif.

Analyse du cas

Prise régulièrement, l’huile de paraffine liquide peut diminuer l’absorption de vitamines liposolubles, notamment de vitamine D. LansoØl pourrait donc interférer avec l’Orocal D3 prescrit pour l’ostéoporose de madame U.

Attitude à adopter

Lors de la dispensation du nouveau traitement pour l’ostéoporose, le pharmacien insiste sur les modalités de prise du Fosamax. Afin de pouvoir faire le point sur les traitements, tous les médicaments délivrés hors prescription sont inscrits dans le dossier pharmaceutique de madame U. Son historique médicamenteux pour les six derniers mois mentionne 2 antihypertenseurs, 3 boîtes de paracétamol, 4 d’Efferalgan Codéiné, une de Dulcolax et 3 pots de LansoØl gelée. Bien que déconseillée avec son nouveau traitement, l’utilisation de paraffine par la patiente est donc fréquente. Le pharmacien propose un laxatif osmotique n’interagissant pas avec le traitement en cours. Il semble en outre évident qu’Efferalgan Codéiné peut entretenir cet état de constipation. Il convient de s’assurer que du paracétamol simple ne suffirait pas à soulager les douleurs de madame U.

3-interactions médicamenteuses

Risque d’ulcère sous potassium

Madame M., 78 ans, est traitée pour une insuffisance cardiaque par Renitec et Hémigoxine. Elle souffre également de douleurs rhumatismales calmées par le paracétamol. Enfin, elle prend depuis 2 ans un traitement contre l’ostéoporose : Actonel 35 (risédronate) et Cacit D3. Tous les 6 mois un ionogramme sanguin est réalisé et les derniers résultats de la patiente ont objectivé une kaliémie inférieure aux valeurs normales. Le médecin lui a donc prescrit du Diffu-K, trois gélules par jour.

Peut-on dispenser ?

Une baisse de kaliémie doit impérativement être corrigée, d’autant que dans le cas présent l’hypokaliémie majore l’action de la digoxine sur l’hyperexcitabilité ventriculaire. La supplémentation en potassium est donc utile mais la forme galénique ne paraît pas optimale chez cette dame âgée.

Analyse du cas

Les gélules de Diffu-K contiennent des microcapsules de chlorure de potassium à dissolution lente, susceptibles d’entraîner une ulcération gastroduodénale. Par ailleurs, la forme gélule est parfois difficile à avaler du fait d’une possible adhérence de la gélatine à l’oesophage.

Actonel est un bisphosphonate et possède donc lui aussi des effets irritants sur la muqueuse oesophagienne et gastro-intestinale. L’association des deux médicaments augmente le risque d’ulcérations, particulièrement chez une personne âgée.

Attitude à adopter

Interrogée, madame M. explique préférer utiliser des médicaments en comprimés. Pour augmenter la kaliémie, le choix se fera donc entre Kaleorid et Nati-K. Les comprimés de Kaleorid, à libération lente de chlorure de potassium, pourraient être une forme galénique plus adaptée chez cette patiente. Le changement de spécialité est finalement proposé au prescripteur par téléphone et retenu pour un traitement d’un mois, au terme duquel un dosage de kaliémie sera à nouveau effectué.

1-profils particuliers

Un risque de surdosage

Neuf heures du matin : madame H. appelle la pharmacie. Le mois dernier, elle est passée d’un traitement hebdomadaire par Actonel 35 mg (risédronate) à un traitement mensuel par Actonel 75 mg. Elle est très inquiète car elle vient de se rendre compte qu’elle a fait une erreur. Le pharmacien lui avait dit de prendre 1 comprimé 2 jours de suite mais elle vient d’avaler les 2 comprimés en même temps. Est-ce grave et que faire ?

Que pense le pharmacien ?

Ce cas de surdosage en bisphosphonate peut avoir plusieurs conséquences, notamment au niveau de la sphère digestive.

Analyse du cas

Un surdosage en bisphosphonate par voie orale peut conduire à une hypocalcémie, une hypophosphorémie et à des lésions de la partie haute du tractus gastro-intestinal (brûlures d’estomac, oesophagite, gastrite, ou ulcère). Si le surdosage est massif, un lavage gastrique pourrait être envisagé afin d’éliminer le produit non encore absorbé. Les vomissements doivent être évités afin de ne pas augmenter le risque d’irritation oesophagienne, et la patiente doit rester le buste en position verticale. Si la prise est récente, il peut être conseillé de prendre du calcium ou des antiacides contenant du magnésium, du calcium ou de l’aluminium afin de fixer le risédronate et réduire son absorption. Par ailleurs, l’éventuelle apparition d’effets indésirables sera traitée de façon symptomatique.

Attitude à adopter

Le pharmacien rassure madame H. car le surdosage n’est pas massif. Néanmoins, des effets indésirables au niveau de la partie haute du tube digestif tels qu’un embarras gastrique, des dyspepsies, une oesophagite ou une gastrite peuvent survenir. Le pharmacien contacte le prescripteur et lui expose la situation : comme la prise est récente, le médecin conseille de boire immédiatement un verre de lait (pour complexer le risédronate) et de croquer 4 cp de Rennie, répartis au fil de la journée.

2-profils particuliers

Madame T. a oublié sa prise mensuelle

Madame T. vient demander conseil à la pharmacie : elle prend Bonviva (ibandronate) en comprimés le 10 de chaque mois. Elle a oublié de le prendre ce mois-ci et nous sommes le 30 septembre.

Que doit-elle faire ?

Les modalités de prise des bisphosphonates sont particulières. En aucun cas on ne peut doubler la dose en une prise.

Analyse du cas

Par voie orale, selon les dosages, les bisphosphonates sont pris quotidiennement (ce qui peu courant en pratique), une fois par semaine ou tous les mois. En règle générale, le comprimé oublié doit être pris dès que possible, tout en respectant bien sûr la prise à jeun. Il est néanmoins important de ne pas doubler la posologie en une prise. Aussi, les règles suivantes doivent être suivies en cas d’oubli :

– Prise quotidienne : ne pas rattraper l’oubli. Prendre le comprimé normalement le lendemain, sans doubler la dose.

– Prise hebdomadaire : prendre le comprimé oublié le matin suivant le jour où est constaté l’oubli. Ne pas décaler la prise suivante. Ne jamais prendre deux comprimés le même jour.

– Prise mensuelle : prendre le comprimé oublié le matin suivant le jour où est constaté l’oubli. Ne jamais prendre deux prises mensuelles la même semaine. Si l’intervalle restant avant la prise suivante est de moins d’une semaine, ne pas prendre le comprimé et attendre la date de la prise suivante. Revenir ensuite au rythme mensuel d’administration, aux dates initialement prévues.

Attitude à adopter

Dans le cas présent, il reste dix jours avant la prise normale du comprimé du mois suivant. Le pharmacien conseille donc à la patiente de prendre son comprimé de Bonviva le lendemain matin, en respectant les règles d’usage (à jeun, avec de l’eau du robinet, ne pas se recoucher ni manger ou boire dans l’heure qui suit). Elle prendra normalement son comprimé le mois prochain (le 10 octobre).

3-profils particuliers

Une immobilisation problématique

Madame H. a fait une chute au ski qui s’est soldée par une fracture de la jambe. Elle a été dirigée vers l’hôpital le plus proche où on lui a réalisé un plâtre de marche. Il lui fut précisé qu’elle devait éviter les déplacements inutiles, surtout les premiers jours. C’est son mari qui se présente à l’officine avec l’ordonnance émanant de l’hôpital : Lovenox 30 000 UI/j, Profénid et Efferalgan codéiné. En lisant la carte Vitale, le pharmacien voit sur le dossier pharmaceutique que la patiente est sous Evista (raloxifène).

Peut-il dispenser ?

Pas sans analyser la situation. Il n’y a pas d’interaction entre les différents traitements de madame H. Cependant, la prise de raloxifène lors de l’immobilisation d’un membre pose problème.

Analyse du cas

L’immobilisation d’un membre avec port de plâtre augmente le risque de survenue d’une thrombose veineuse profonde. La prescription d’un traitement par héparine de bas poids moléculaire (HBPM) à posologie préventive est donc effectivement recommandée pour réduire le risque. Le raloxifène est lui-même également associé à un risque accru d’accident thromboembolique veineux et doit être interrompu en cas d’immobilisation prolongée.

Attitude à adopter

Lors de la consultation en urgence, le médecin n’a probablement pas eu connaissance du traitement en cours par Evista. Le pharmacien contacte donc le médecin ayant prescrit le traitement antiostéoporotique pour lui exposer le cas de la patiente : immobilisation par plâtre et prescription d’HBPM. Le médecin préconise une suspension du traitement par Evista jusqu’à ablation du plâtre et remercie le pharmacien de son appel. Ce dernier explique le problème à monsieur H. lors de la dispensation, et inscrit cet arrêt provisoire d’Evista sur l’ordonnance.

4-profils particuliers

Sous Médrol pour plusieurs mois

Madame P., 70 ans, souffre depuis un mois de violentes douleurs à l’épaule. Un rhumatologue vient de diagnostiquer une pseudo-arthrite rhizomélique. La prescription comprend Médrol 16 mg (méthylprednisolone), 2 cp le matin pendant un mois à l’issue duquel le spécialiste souhaite la revoir. Le traitement doit être poursuivi jusqu’à disparition complète des douleurs, ce qui devrait prendre plusieurs mois.

Que penser du traitement ?

Une corticothérapie à posologie élevée ( > 7,5 mg/jour d’équivalent prednisone) pendant plus de 3 mois entraîne une ostéoporose cortisonique à prévenir chez une personne âgée.

Analyse du cas

Les corticoïdes au long cours entraînent de nombreux effets métaboliques, parmi lesquels une ostéoporose cortisonique, à la fois par augmentation du catabolisme phosphocalcique et par diminution de l’absorption intestinale et de la réabsorption rénale du calcium. A l’instauration de la corticothérapie et pendant toute sa durée, il est opportun d’ajouter un traitement antiostéoporotique préventif ou, a minima, une supplémentation calcique. Dans la prévention de l’ostéoporose cortisonique, seul Didronel 400 mg (étidronate) a l’AMM pour tout type de patient. Actonel 5 mg (risédronate) a l’AMM dans cette indication mais uniquement chez les femmes ménopausées, alors que les autres molécules ou dosages ne sont remboursables dans cette indication que chez les femmes ostéoporotiques.

Attitude adoptée

Le pharmacien contacte le rhumatologue pour lui faire part de son interrogation quant au risque d’ostéoporose chez madame P. Le spécialiste répond avoir prescrit Actonel 5 mg à la patiente sur une ordonnance à part. En cherchant bien, madame P. finit effectivement par retrouver la prescription au fond de son sac à main. Ce traitement préventif est important, au même titre que les règles hygiénodiététiques à suivre tout au long du traitement : apport sodé réduit, ration protéique augmentée, apport calcique alimentaire suffisant.

5-profils particuliers

Monsieur J. craint les effets indésirables

Monsieur J., 59 ans, est un patient habituel de la pharmacie. Il est sous Revia (naltrexone) depuis 6 semaines et se plaint depuis quelque temps de douleurs lombaires. Une radiographie a confirmé l’existence de tassements vertébraux et une ostéodensitométrie a objectivé une ostéopénie. Le médecin lui a expliqué qu’il envisageait d’instaurer un traitement de l’ostéoporose avec une injection par an du nouveau produit Aclasta (acide zolédronique), associé à du calcium. Avant de commencer le traitement, il a demandé au patient de faire un bilan dentaire. Monsieur J. a cherché sur Internet des informations sur Aclasta, il a vu de nombreux effets indésirables et montre au pharmacien les données qu’il a imprimées : syndrome pseudo-grippal, fièvre, maux de tête, fatigue, troubles digestifs, douleurs osseuses, musculaires ou articulaires, troubles du rythme cardiaque, en plus des problèmes dentaires… Il est un peu inquiet quant à l’utilisation de ce traitement.

Qu’en pense le pharmacien ?

Les effets indésirables des bisphosphonates exposés sur les notices sont nombreux (en particulier pour Aclasta) et inquiètent souvent les patients, mais ces médicaments ne sont pas dangereux si l’on respecte scrupuleusement les modalités d’utilisation.

Analyse du cas

L’ostéoporose peut également atteindre les hommes, et ce avec les mêmes conséquences que chez les femmes (fractures, déformations osseuses et douleurs).

L’alcoolisme chronique peut notamment entraîner un défaut de minéralisation de la matrice osseuse suite à des troubles du métabolisme de la vitamine D (ostéomalacie, avec fatigue musculaire et douleurs osseuses) et favoriser l’apparition d’ostéoporose précoce.

Le médecin a posé le diagnostic d’ostéoporose chez monsieur J. et souhaite initier un traitement afin de réduire le risque de survenue de fractures. Actuellement, toutes les molécules disponibles pour le traitement de l’ostéoporose ne sont pas indiquées (ou remboursées) chez l’homme (voir encadré ci-dessous). Aclasta a bénéficié d’une extension d’indication chez l’homme en janvier 2009 et est remboursable dans ce cadre depuis août 2009. Aclasta est également pris en charge par la Sécurité sociale indifféremment chez l’homme ou la femme dans le traitement de la maladie de Paget.

Par ailleurs, les effets indésirables connus de l’acide zolédronique injectable légitiment un bilan dentaire avant d’instaurer le traitement chez certains patients, mais aussi l’administration de paracétamol ou d’ibuprofène juste après la perfusion pour prévenir l’apparition d’un syndrome pseudo-grippal.

Attitude à adopter

Le pharmacien rassure monsieur J. : la visite chez le dentiste est une précaution essentielle avant le début du traitement afin de prévenir le risque d’ostéonécrose des mâchoires. Par ailleurs, le traitement n’est pas très contraignant, avec une seule perfusion par an, suite à laquelle il est conseillé de prendre du paracétamol pendant deux jours pour prévenir l’apparition d’un syndrome pseudo-grippal. Le pharmacien insiste sur l’importance de la prise régulière de la supplémentation vitaminocalcique pour augmenter la densité osseuse.

L’ostéoporose au comptoir

– Les traitements de l’ostéoporose postménopausique ont pour objectifs de soulager les douleurs vertébrales et de prévenir la survenue de fractures dans un délai de 5 à 10 ans. La durée minimale de traitement recommandée est de 4 ans (sauf pour le tériparatide, 18 mois). Cependant, l’observance reste très insuffisante : 3 patientes sur 10 ne poursuivraient pas leur traitement antiostéoporotique au-delà d’un an.

– Lors de la dispensation, plusieurs étapes sont incontournables :

– Conseils de prise : spécificités de chaque classe, conduite à tenir en cas d’oubli de prise, réévaluation ponctuelle du respect des modalités de prise lors de renouvellement de traitements (bisphosphonates).

– Surveillance de la tolérance : attention à l’automédication pour des symptômes apparemment bénins (dysphagie, brûlures oesophagiennes…), noter les médicaments hors prescription dans l’historique.

– Observance : le traitement ne peut être efficace que s’il est pris correctement.

– Apport calcique : en cas de mauvaise tolérance de la supplémentation calcique, étudier un aménagement de prise ou un changement de spécialité.

– Un traitement de l’ostéoporose ne dispense pas des mesures hygiénodiététiques de base : apport calcique alimentaire, ensoleillement suffisant, activité physique…

À RETENIR

Lors de la dispensation d’Aclasta, il est judicieux d’informer le patient de la possible survenue de fièvre. Elle peut être prévenue par la prise de paracétamol juste après la perfusion du produit.

À RETENIR

Le traitement par Forsteo est contraignant et parfois à l’origine de douleurs dans les membres pouvant nécessiter l’arrêt de la molécule. Il ne peut être poursuivi plus de 18 mois au cours d’une vie.

À RETENIR

Le libre accès ne doit pas court-circuiter l’étape du questionnement du patient. Le contexte de toute délivrance d’antiacide, doit notamment être connu.

À RETENIR

Les effets vasomoteurs de l’Evista sont fréquents et peuvent parfois nécessiter un changement de traitement.

À RETENIR

L’observance de la supplémentation calcique pose problème chez un grand nombre de patients en raison de sa mauvaise tolérance digestive.

ATTENTION !

Rappeler aux patients concernés que l’hygiène buccodentaire est un paramètre important lors d’un traitement par bisphosphonate. Des suspensions de traitement peuvent être nécessaires pour prodiguer certains soins dentaires.

Facteurs de risque de l’ostéoporose

L’ostéoporose est un phénomène lié à l’âge, plus fréquent chez la femme suite à la privation d’estrogène due à la ménopause.

– Les facteurs de risque sont connus : âge, sexe féminin, indice de masse corporelle inférieur à 19, antécédents familiaux d’ostéoporose, ménopause précoce (avant 40 ans, quelle qu’en soit la cause), tabagisme, alcoolisme, inactivité physique, alitement prolongé…

– L’ostéoporose peut être secondaire à d’autres pathologies (maladies endocrines, rhumatismales) ou d’origine iatrogène : corticothérapie de plus de 3 mois à dose quotidienne supérieure à 7,5 mg d’équivalent prednisone, héparinothérapie, hormones thyroïdiennes à forte posologie, glitazones…

– A ces facteurs, s’ajoutent des facteurs de risque de chute, donc de fractures, à prendre en compte spécialement chez la personne âgée du fait de la diminution de l’acuité visuelle, de troubles neuromusculaires ou orthopédiques. Sans oublier les risques iatrogéniques : hypotension orthostatique avec des traitements cardiovasculaires ou psychotropes, relâchement musculaire avec les benzodiazépines par exemple.

À RETENIR

Toute réaction cutanée sous Protelos doit faire envisager la survenue d’un syndrome DRESS et conduire à une suspension du traitement et une consultation médicale immédiate.

À RETENIR

Il est utile de vérifier régulièrement auprès des patients les modalités de prise des bisphosphonates. Ceci permet de corriger des dérives qui peuvent apparaître au fil du temps.

ATTENTION !

Il est important de noter les médicaments délivrés hors prescription dans l’historique informatique des patients afin de pouvoir visualiser toute éventuelle interaction avec les traitements prescrits.

À RETENIR

Les bisphosphonates ont des effets irritants sur les muqueuses. Prudence en cas d’associations avec d’autres médicaments irritants.

À RETENIR

Le passage d’une forme à une autre (ici hebdomadaire à mensuelle) peut conduire à des oublis ou erreurs de prise, particulièrement dans le cas d’Actonel 75 mg qui est la seule spécialité à se prendre sur 2 jours consécutifs.

ATTENTION !

Lors de la dispensation d’un bisphosphonate, il est utile d’aborder préventivement la conduite à tenir en cas d’oubli de prise. Bien avertir qu’en aucun cas on ne doit doubler la dose en une prise.

ATTENTION !

Les traitements par raloxifène doivent être interrompus en cas d’immobilisation prolongée car ils favorisent les accidents thromboemboliques veineux.

ATTENTION !

Une corticothérapie au long cours fait courir un risque d’ostéoporose, nécessitant d’être prévenu chez certains patients.

À RETENIR

Les notices de médicament ou les informations lues sur Internet peuvent alerter les patients. A l’officine, il est important de pouvoir apporter des compléments d’information et de hiérarchiser les effets indésirables.

Les traitements de l’ostéoporose masculine

– Chez l’homme, l’ostéoporose est moins fréquente et apparaît plus tardivement que chez la femme, mais elle altère la qualité de vie des patients. Près d’un tiers des fractures ostéoporotiques surviennent chez des hommes.

– Seuls certains médicaments sont indiqués dans le traitement de l’ostéoporose masculine, chez les patients à risque :

– l’alendronate 10 mg (Fosamax), le risédronate 35 mg (Actonel) et, depuis peu, l’acide zolédronique (Aclasta) sont remboursés dans cette indication,

– le tériparatide 20 mg (Forsteo) n’est, à ce jour, pas remboursé dans cette indication.

– L’étidronate 400 mg (Didronel) est quant à lui indiqué en prévention de l’ostéoporose cortisonique chez les patients (hommes ou femmes) sous corticothérapie systémique ancienne ou actuelle à une posologie ³ 7,5 mg/jour d’équivalent prednisone pendant plus de 3 mois.

– Les études chez l’homme ont prouvé une augmentation de la densité minérale osseuse sous traitement antiostéoporotique, sans qu’une efficacité antifracturaire n’ait été démontrée à ce jour.

Ce qu’il faut retenir

Bisphosphonates

– Lors de la délivrance, veiller à donner tous les conseils de prise nécessaires : fréquence, délai par rapport aux repas, eau faiblement minéralisée, buste droit, conduite en cas d’oubli.

– Interroger régulièrement les patients sur leurs prises afin de corriger les dérives pouvant s’installer avec le temps.

– Attention aux passages d’une forme à une autre (molécule ou dosage) conduisant à des changements de schéma de prise et pouvant entraîner des erreurs.

– Rappeler aux patients l’importance d’une bonne hygiène buccodentaire. Certains soins dentaires peuvent nécessiter la suspension temporaire du traitement par bisphosphonate.

– Aclasta est susceptible de provoquer un syndrome pseudo-grippal en début de traitement.

– Attention aux délivrances d’antiacides ! Interroger systématiquement le patient sur le contexte de la demande. Espacer les prises avec le traitement par bisphosphonates ou ranélate de strontium (Protelos).

Raloxifène (Evista, Optruma)

– Bouffées de chaleur fréquentes.

– Interrompre les prises en cas d’immobilisation prolongée.

Tériparatide (Forsteo)

– Traitement poursuivi au maximum 18 mois au cours d’une vie.

– Des douleurs dans les membres sont susceptibles d’apparaître sous Forsteo. Elles peuvent nécessiter l’arrêt du traitement.

Ranélate de strontium (Protelos)

– Toute réaction cutanée sous Protelos doit faire suspecter un syndrome DRESS, et donc conduire à la suspension du traitement et à une consultation médicale rapide.

Calcium

– La supplémentation calcique est souvent mal suivie du fait de sa mauvaise tolérance digestive.

en savoir plus

Groupe de recherche et d’information sur les ostéoporoses

http://www.grio.org

Ce site Internet très complet comporte un espace pour les professionnels de santé et un autre pour le grand public. On peut y trouver avis et recommandations de la HAS, fiches pratiques, brochures téléchargeables, explications relatives à la pathologie, 100 questions-réponses, outils d’évaluation personnalisé du risque d’ostéoporose, apports de calcium journaliers…Société française de rhumatologie

http://www.rhumatologie.asso.fr

Dans l’onglet « Les grandes maladies », en cliquant sur « Ostéoporose », on obtient une définition de la pathologie, l’évolution, le diagnostic, les traitements, une interview filmée d’un spécialiste sur l’observance… Des fiches pratiques sont également téléchargeables : prévention, diététique, teneur en calcium des aliments, besoins calciques selon l’âge, information patient sur l’ostéodensitométrie…