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Saison bien préparée, été non meurtrier
Comme chaque année depuis 2004, le dispositif Plan national canicule est activé du 1er juin au 15 septembre. La ministre de la Santé appelle à la vigilance et à la mobilisation de tous les professionnels pour que la saison estivale 2019 ait peu d’impact sanitaire.
La chaleur tue. Quatre voyageurs de 70 à 80 ans sont morts dans un train au nord de l’Inde en juin. Des températures extérieures de plus de 40 °C ont transformé le wagon en four. Le coup de chaleur a été fatal en quelques heures. En France, depuis les 15 000 morts de la canicule de 2003, tout est mis en œuvre pour éviter une nouvelle catastrophe sanitaire. Informer, alerter, prévenir et prendre en charge, le dispositif Plan national canicule (PNC) est activé du 1er juin au 15 septembre depuis 2004 (voir encadré). Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, a réuni le 18 juin les représentants des professionnels de santé et les acteurs mobilisés en été « afin que le système de santé soit en capacité de répondre aux situations particulières de la période estivale ».
L’été sera (ou pas) très chaud
Météo France ne peut pas dire en juin si une canicule nous tombera dessus en août. Sur son site, elle indique pour juin-juillet-août 2019 : « Une grande partie de l’Europe devrait connaître cet été des températures plus chaudes que la normale. » Il fera très chaud, alors ? « Non. Les prévisions saisonnières donnent seulement une tendance plus chaude ou plus froide sur les 3 mois à venir », explique Françoise Bénichou, adjointe au directeur des opérations pour la prévision à Météo France, mais cela ne présage en rien que vous aurez une vague de chaleur sur 10 jours ou une canicule en août ». Ces modèles de prévision sont réalisés deux fois par mois. Ils peuvent avoir changé au moment où vous lisez cet article…
Dans les vigilances, je demande l’orange
« Il n’existe aucune définition mondiale ou européenne de la canicule », constate Françoise Bénichou. « En regard de moyennes de températures minimales et maximales sur 3 jours consécutifs, et des seuils établis à la suite d’études menées par Santé publique France entre les corrélations des surmortalités et des températures, on a des critères d’aide à la décision de la couleur de vigilance », explique l’experte. Cela diffère selon les départements. Une température de 31 °C est habituelle à Toulouse, elle l’est moins dans le Nord…
Cette vigilance météorologique de Météo France se matérialise par une carte avec quatre niveaux de couleur qui traduisent l’intensité du risque de canicule auquel la population sera exposée. Vert, les températures sont estivales mais habituelles. Jaune, la chaleur est intense sur un ou deux jours, ou moins intense mais annonçant une vague de chaleur plus forte les jours suivants. Orange signifie des températures élevées sur au moins trois jours, et trois nuits. Rouge, la chaleur est exceptionnelle en durée, intensité et touche une très grande partie du territoire. Météo France publie chaque jour à 16 heures la carte de vigilance qui servira au grand public et au préfet, seul maître à bord pour mettre en place des actions locales. « Météo France fournit la vigilance, le préfet décide de l’alerte », précise Françoise Bénichou. L’alerte canicule est déclenchée pour une vigilance orange, mais le Plan canicule contient des mesures en fonction des situations. Ainsi, en cas de chassé-croisé ou de manifestations sportives, même en niveau jaune « Avertissement chaleur », un préfet ou une agence régionale de santé peuvent décider de communiquer car ce sont des situations à risque.
Les canicules sont meurtrières
Boire beaucoup, rester au frais, se rafraîchir, tout le monde connaît ces conseils qui portent leurs fruits. « J’en veux pour preuve la meilleure gestion des différents épisodes de chaleur qu’on a vécus depuis 2003 et leur moindre impact au niveau santé publique », constate le Dr Dominique Bonnet-Zamponi, gériatre, membre de la commission sécurité du patient et système de santé du Haut Conseil de Santé publique (HCSP), copilote de l’actualisation des recommandations sanitaires canicule en 2014(1), et chargée du bon usage du médicament chez la personne âgée à l’Omedit(2) Île-de-France.
Nous sommes loin des 15 000 morts de 2003, « mais il y a quand même eu 1 600 décès en excès lors des différents épisodes de canicule de l’été 2018 », pointe Karine Laaidi, chargée de projet Climat et santé à l’Agence nationale de Santé publique(3), qui incite « à ne pas se relâcher » au vu des 1 700 victimes de la canicule de 2015 et des 1 400 de celle de 2006. « Il faut continuer à informer car certains messages ont été compris de travers, et les gens n’ont pas forcément saisi qu’il y avait deux types de risque, la déshydratation et le coup de chaleur », ajoute le médecin « boire beaucoup n’est pas le message essentiel. »
Manger contre la déshydratation
Il faut aussi continuer à manger pour apporter du sel, car c’est lui qui retient l’eau dans l’organisme. « Si on ne fait que boire, on ne s’hydrate pas ! », prévient le médecin. De nombreuses personnes se retrouvent aux urgences en hyponatrémie de dilution parce qu’elles ont bu 6 à 7 litres d’eau sans rien avaler. « Le risque de déshydratation concerne surtout les jeunes, les adultes en bonne santé et les personnes sous diurétiques. Il est prévenu en buvant et en maintenant les apports en sel », explique le Dr Bonnet-Zamponi. Le coup de chaleur est le fait de ne plus pouvoir régler sa température corporelle interne parce que la sudation est trop faible ou inexistante. » Sont donc particulièrement exposés au risque de coup de chaleur « les personnes âgées qui ont des problèmes de sudation, les insuffisants cardiaques parce qu’ils n’ont plus assez d’énergie pour suer et tous ceux qui prennent des médicaments qui perturbent la sudation, psychotropes, etc. »
Brumisateur et ventilateur, amis des aînés
« Le risque du coup de chaleur est prévenu non pas en buvant ou en mangeant, mais en s’aspergeant la peau avec de l’eau, et en maintenant une ventilation », explique le Dr Bonnet-Zamponi. Il s’agit de reproduire artificiellement la transpiration en reconstituant la sueur sous forme de brume, puis en la faisant s’évaporer pour réguler la température corporelle. Brumisateur et ventilateur sont ainsi les meilleurs amis des personnes âgées, « celles qui paient le plus lourd tribut », analyse Karine Laaidi. Elles doivent certes en premier lieu se rafraîchir, mais aussi boire tout en mangeant. » Le risque d’hyponatrémie existe, mais celui de déshydratation aussi. « Dans les passages aux urgences de l’été 2018, ceux pour coup de chaleur concernaient en grande majorité les moins de 75 ans, et les déshydratations en grande majorité les 75 ans et plus », pointe l’experte de Santé publique France. Elle relève aussi une surmortalité des moins de 15 ans en 2015, « 49 décès en plus ». L’hypothèse avancée est celle d’une canicule précoce, où les enfants, encore à l’école, sont peut-être moins bien protégés… « Dans tous les cas, les décès sont assez liés à l’intensité de la chaleur », souligne Karine Laaidi. Déshydratation et coup de chaleur sont les conséquences sanitaires de l’exposition à la chaleur, et surviennent d’autant plus que les facteurs de risque se cumulent chez une personne qui transpire moins, prend des diurétiques et des psychotropes, vit seule, en ville, etc. Encore faut-il que la personne sache qu’elle est à risque.
La personne à risque, c’est l’autre
Selon Santé publique France, peu de personnes, et de tous âges, se considèrent à risque en cas de canicule. « Il y a encore du chemin à faire », regrette Karine Laaidi. Seules 4 % des personnes âgées ont déclaré être inscrites sur le registre nominatif des personnes vulnérables de la commune que sont tenus d’instituer les maires. S’y inscrivent les personnes de 65 ans et plus, les 60 ans inaptes au travail, et les handicapés à leur demande ou à celle d’un tiers afin d’être informés et appelés régulièrement en cas de fortes chaleurs. Sans doute un défaut d’information que pourraient pallier les officinaux qui sont, selon le Dr Bonnet-Zamponi, « en première ligne pour détecter les signes d’alerte de la déshydratation et du coup de chaleur. Et lutter contre l’ignorance ». Le médecin copilote les recommandations canicule de 2014(1), dont une fiche est dédiée aux officinaux, suggère de repérer les personnes à risque, âgées, polymédicamentées, isolées, puis de cibler les conseils « dès le premier jour de chaleur inhabituelle car le risque est immédiat ». Nul besoin d’attendre la canicule. Consulter le bulletin de vigilance sur vigilance.meteofrance.com dès 16 heures. Informer dès la vigilance jaune. Inciter ces personnes vulnérables à s’inscrire sur la liste de la mairie, ou les appeler lors d’une canicule. Et distribuer les brochures dédiées aux grosses chaleurs à commander gratuitement sur santepubliquefrance.fr
(1) Recommandations sanitaires du Plan national canicule 2014, HCSp 2014 sur www.hscp.fr
(2) Observatoire des médicaments, DM et innovations thérapeutiques.
(3) L’Agence nationale de santé publique est un établissement public français administratif placé sous la tutelle de la ministre de la Santé. Créé en 2016, elle regroupe les ex-Institut de veille sanitaire (InVS), Institut national de prévention et d’éducation à la santé (Inpes) et Eprus ou réserve sanitaire.
Le Plan canicule, c’est quoi ?
En France, après la canicule meurtrière de 2003, le directeur général de la Santé a convaincu le gouvernement d’élaborer un Plan national canicule (PNC). Le PNC regroupe, autour de Météo-France et de l’agence nationale Santé publique France, tous les ministères impliqués dans la santé : Intérieur, Travail, Transports, Sports… Mis en œuvre dès 2004, le PNC vise à recueillir instantanément des informations climatiques et sanitaires sur tout le territoire. Il mobilise les services décentralisés de l’État, sous l’autorité du préfet, et produit des recommandations pour tous les intervenants potentiels.
→ Le PNC s’articule avec les quatre couleurs de vigilance météo : vert (veille saisonnière, niveau 1) ; jaune (avertissement chaleur, niveau 2 : pic intense de chaleur limité à 1 ou 2 jours ou fortes chaleurs durables ) ; orange (niveau 3 : alerte canicule) ; rouge (niveau 4 : mobilisation générale).
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