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Un profil peut se retourner contre soi
Une salariée licenciée sans cause réelle et sérieuse, un employeur qui évoque le contenu du profil LinkedIn de celle qu’il renvoie pour faire baisser la note… Que se profile-t-il ?
LES FAITS
Le 21 octobre 2013, Mme J. est engagée par la société CC en qualité de responsable du pôle gestion des commandes. Le 10 septembre 2014, la salariée est licenciée pour insuffisance professionnelle. Estimant que cette décision est injustifiée, Mme J. saisit le conseil de prud’hommes.
LE DÉBAT
L’article L.1235-3 du Code du travail dispose que le salarié dont le licenciement est sans cause réelle et sérieuse peut être réintégré dans l’entreprise ou obtenir une indemnité de l’employeur si celui-ci ou le salarié lui-même refuse sa réintégration.
Depuis avril 2018, le juge n’est plus entièrement libre de fixer le montant de l’indemnisation ; il doit respecter le barème dit « Macron ». Dans les limites hautes et basses du barème, le juge retrouve en revanche son pouvoir d’appréciation. Il évalue ce montant en fonction de l’âge du salarié, de sa qualification, de son ancienneté dans l’entreprise, etc.
En l’espèce, la société CC produisait au juge un extrait du profil du réseau social professionnel LinkedIn qui démontrait que Mme J. avait trouvé un nouvel emploi moins d’un mois après son licenciement. Le profil indiquait que la salariée avait « d’octobre 2014 à février 2016, réalisé une étude et effectué des démarches en vue de la reprise d’une entreprise ». Ce fait justifiait, selon l’entreprise, une évaluation au plus juste de l’indemnité. En réponse, Mme J. produit une attestation de Pôle emploi prouvant sa qualité de demandeuse d’emploi pendant plus de trois ans. Le 9 septembre 2020, la cour d’appel de Versailles (Yvelines) évalue à 10 000 € le montant de ses dommages-intérêts. Les magistrats retiennent le profil LinkedIn établissant que Mme J. avait retrouvé un emploi depuis octobre 2014, soit un mois après son licenciement. Elle forme un pourvoi en cassation.
LA DÉCISION
Le 30 mars 2022, la Cour de cassation casse et annule la décision de la cour d’appel. Les hauts magistrats considèrent que cette dernière a dénaturé le contenu des preuves fournies en les surinterprétant. Ils estiment que le profil LinkedIn de la salariée ne mentionne pas un retour à l’emploi en 2014, mais seulement un projet de rachat d’entreprise. La cour d’appel n’a donc pas correctement évalué le montant des dommages-intérêts qui devront être versés à Mme J., rien dans son profil n’indiquant que cette activité avait été rémunérée ou salariée.
Cette décision est intéressante vis-à-vis de l’usage en justice des informations divulguées sur les réseaux sociaux. Ainsi, les informations mises en ligne par les salariés sont des éléments de preuve parfaitement recevables dès lors qu’ils ont été collectés loyalement, c’est-à-dire sans user de stratagème frauduleux. Sur un réseau public, le salarié ne maîtrise donc pas l’usage des données qu’il dépose. A l’officine, la convention collective octroie au salarié, pendant un préavis de départ, des heures quotidiennes de recherche d’emploi.
Cette décision pourrait permettre à l’employeur de lui en refuser le bénéfice au motif que son profil du réseau social LinkedIn démontre qu’il a déjà trouvé un poste. De même, ce profil pourrait être utilisé dans le cadre du respect de l’obligation déontologique de non-concurrence entre pharmaciens.
Source : Cass. Soc., 30 mars 2022, n° 20-21.665.
À RETENIR
Un licenciement sans cause réelle et sérieuse permet au salarié soit d’être réintégré, soit d’obtenir un dédommagement.
Le juge évalue le montant du dédommagement dans les limites hautes et basses du barème de l’article L.1235-3 du Code du travail, dit barème « Macron ».
Le contenu du profil LinkedIn d’un salarié peut être produit en justice en qualité de preuve.
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