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Coache toujours, tu m’intéresses…
Un salarié, conseiller sportif, tient des propos défavorables sur ses supérieurs auprès de ses collègues et des clients de la société. Licencié, il saisit les prud’hommes car il estime avoir dit la vérité. Le 20 mars 2024, la Cour de cassation donne raison à l’employeur.
Les faits
Le 3 novembre 2014, M. J. est engagé en qualité de conseiller sportif par la société AF. Trois ans après, il est convoqué à un entretien préalable à son licenciement avec une mise à pied à titre conservatoire. Le 1er septembre 2017, il est renvoyé pour faute grave. L’employeur estime que M. J. a abusé de sa liberté d’expression, notamment en écrivant à sa collègue « que les dirigeants ne pensaient qu’à choper des adhérentes […], qu’ils n’étaient que des vicieux qui ne tenaient pas leurs engagements ou encore qu’ils étaient habitués à vivre dans le mensonge ». En contestation de cette décision, M. J. saisit le conseil de prud’hommes. Déjà sanctionné pour ces faits, il considère alors que son licenciement est nul et que ses propos ne peuvent pas justifier une faute.
Le débat
En droit du travail, le principe « non bis in idem » interdit à l’employeur de sanctionner le salarié deux fois pour des faits similaires. Face à un comportement fautif du collaborateur, l’employeur doit choisir la sanction proportionnée à la faute dans l’arsenal prévu par le Code du travail. L’article L. 1331-1 définit la sanction comme : « toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ». En l’espèce, M. J. a fourni à la justice un e-mail envoyé par son employeur pendant sa période de mise à pied dans lequel ce dernier s’employait à caractériser divers manquements du salarié à ses obligations contractuelles, en lui intimant d’y mettre un terme et en énonçant qu’il ne tolérait plus cette attitude. M. J. estime que cet e-mail constituait un avertissement, de sorte que l’employeur ne pouvait plus le licencier pour les mêmes faits. Au-delà, il fait valoir que ses propos tenus, comme s’ils étaient vrais, ne constituaient pas un abus de sa liberté d’expression. Le 10 février 2022, la cour d’appel de Versailles (Yvelines) a rejeté l’argumentaire de M. J. Les magistrats n’ont pas qualifié l’e-mail de l’employeur d’avertissement, mais de simple rappel à l’ordre. Cette qualification n’étant pas une sanction, l’employeur conservait la possibilité de licencier M. J. Elle ajoute que ce dernier n’apporte pas de preuve de la véracité des faits décrits dans ses propos. Il forme un pourvoi en cassation.
La décision
Le 20 mars 2024, la Cour de cassation a confirmé la décision de la cour d’appel. Dans un premier temps, les hauts magistrats ont rappelé que le salarié jouit à l’intérieur de l’entreprise de sa liberté d’expression. Mais l’exercice de cette liberté peut justifier un licenciement s’il dégénère en abus. La Cour de cassation a donc retenu que les propos tenus par M. J. étaient dénigrants, déplacés et mettaient en cause l’honnêteté des dirigeants de la société. M. J. a donc abusé de sa liberté d’expression, sans pouvoir évoquer l’exception de vérité. Son renvoi pour cette cause est donc valable. De plus, les hauts magistrats ont ajouté qu’aucune sanction n’était prise à l’encontre de M. J. dans l’e-mail de la direction envoyé le 19 août 2017. L’employeur s’est simplement borné « à demander au salarié de faire preuve de respect à son égard, de cesser d’être agressif, de faire preuve de jugements moraux, de colporter des rumeurs et autres dénigrements auprès de la clientèle et des autres salariés ». Le courriel constituait tout au plus un rappel à l’ordre.
À retenir
Le principe « non bis in idem » interdit à l’employeur de sanctionner deux fois le salarié pour des faits similaires.
Un salarié peut être licencié pour faute s’il abuse de sa liberté d’expression.
Un salarié abuse de sa liberté d’expression lorsqu’il tient des propos dénigrants, déplacés, mettant en cause l’honnêteté des dirigeants quand bien même ils seraient avérés.
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