Un produit défectueux s’apprécie au regard du rapport bénéfice-risque

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Publié le 15 novembre 2018
Par Anne-Charlotte Navarro
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Le Code civil prévoit que le producteur est responsable des défectuosités du produit. En matière de santé, le fabricant pouvait s’en exonérer si les troubles étaient prévus sur la notice. La Cour de cassation a jugé le contraire, le 26   septembre 2018.

LES FAITS

Le 22 novembre 2007, une patiente, Mme X., âgée de 25 ans décède d’une embolie pulmonaire massive. A l’issue d’une expertise médicale, la survenue de cette pathologie est imputée à la prise du contraceptif oral Adepal. Les parents de Mme X. assignent en indemnisation l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam), pour obtenir un dédommagement. L’Oniam appelle le laboratoire fabricant sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux.

LE DÉBAT

L’article 1245-3 du Code civil dispose «   qu’un produit est défectueux lorsqu’il n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre. Dans l’appréciation de la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre, il doit être tenu compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l’usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation   ». Les magistrats considèrent que le caractère défectueux s’apprécie en tenant compte de toutes les circonstances et, entre autres, de la présentation du produit et de sa notice. Le 9 mai 2017, les magistrats de la cour d’appel de Lyon (Rhône) décident de mettre hors de cause le producteur. L’Oniam est condamné à indemniser la famille de Mme X. à hauteur de 1 000 euros pour rembourser les frais de procédures. Les magistrats estiment que «   le contraceptif ne peut être considéré comme défectueux, dès lors que la notice l’accompagnant comporte une mise en garde contre le risque thromboembolique et l’évolution possible vers une embolie pulmonaire   ». Les parents de Mme X. forment un pourvoi en cassation.

LA DÉCISION

Le 26 septembre 2018, les magistrats de la Cour de cassation cassent et annulent l’arrêt de la Cour d’appel. Ils considèrent que la Cour d’appel aurait dû rechercher si la gravité du risque thromboembolique encouru et la fréquence de sa réalisation excédaient les bénéfices attendus d’un contraceptif. Les hauts magistrats estiment que la sécurité d’un produit doit être appréciée au regard de la gravité des effets nocifs constatés et, le cas échéant, au regard du rapport bénéfice-risque que le produit présente. Dans les prochains mois, la cour d’appel de Lyon sera à nouveau saisie pour apprécier l’indemnisation à verser aux parents de la jeune fille. Notons que ces magistrats peuvent décider de maintenir leur interprétation du droit, contrairement à la décision de la Cour de cassation. 

Source : Cass. civ 1., 26   septembre 2018, n°   17-21271

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