- Accueil ›
- Législation ›
- Droit des sociétés ›
- Libertés conditionnelles
Libertés conditionnelles
Selas D’un maniement délicat, la SELAS doit être mise sur pied avec d’infinies précautions, en particulier lors de la rédaction des statuts et du pacte d’associés. La liberté des parties a un prix. Explications
La société d’exercice libéral par actions simplifiée (SELAS), instituée par la loi NRE du 15 mai 2001 sur la base de la société par actions simplifiée (SAS), répond aux besoins des professions libérales réglementées (avocats, notaires, médecins, pharmaciens…). La SELAS se caractérise par sa grande liberté statutaire (notamment quant à l’organisation du pouvoir) et son formalisme restreint.
« Les relations entre les associés relèvent largement des statuts et conventions, plutôt que de dispositions légales », précise Luc Fialletout, directeur général adjoint d’Interfimo. Ainsi, les statuts fixent librement les modalités de fonctionnement de la direction de la société et de désignation des dirigeants, le contrôle des dirigeants par un organe collégial, la durée de leur mandat et leur mode de rémunération. Le contrat de société détermine librement les conditions et formes des décisions collectives (tenue des assemblées, exercice du droit de vote, règles de quorum et majorités). Toutefois, la loi du 15 mai 2001 impose quelques modalités spécifiques aux sociétés de professions libérales, concernant notamment l’agrément de nouveaux associés, la qualité du président et des dirigeants de la SELAS…
Quelles indications ?
« La SELAS est la seule forme sociale qui permet de dissocier la détention du capital et les droits de vote, indique Luc Fialletout. Elle seule permet d’exploiter cette aberration de la loi MURCEF qui permet à l’investisseur de détenir 99 % des actions d’une société dans laquelle il n’exerce pas, tout en réservant 51 % des droits de vote au pharmacien qui la gère pour son compte. La loi MURCEF doit être modifiée pour qu’une telle distorsion ne devienne pas un modèle économique d’organisation de la pharmacie. »
Du fait de cette particularité, « l’application du droit pharmaceutique n’est pas adaptée aux conditions d’exercice en SELAS », fait remarquer Hubert Mathieu (Anticyp), qui souligne que la rédaction des statuts est d’une grande complexité, les spécialistes du droit avançant en terrain inconnu. « Cet espace de liberté est une brèche dans le fondement des SEL qui confère, en principe, un pouvoir absolu de dirigeant à l’exploitant », estime Gérard Martinez, avocat (cabinet PharmaOne). Toutefois, « cette latitude au niveau du capital et des droits de vote peut être précieuse au cas par cas, pour permettre à un pharmacien investisseur de créer dans sa zone de chalandise une pharmacie filiale exploitée par un jeune diplômé, poursuit Hubert Mathieu. Maîtriser un secteur de commercialité par le biais d’une SELAS dans lequel le pharmacien investisseur, déjà en place, est majoritaire en capital est une indication de choix. »
Un risque à connaître : l’exploitant minoritaire en capital mais majoritaire en droits de vote peut très bien décider de s’octroyer une augmentation de salaire ou de surseoir à la distribution de dividendes. Pour y échapper, « le pharmacien investisseur majoritaire peut être tenté d’utiliser de manière occulte ou illicite la grande liberté contractuelle des SELAS pour émasculer les pouvoirs de l’exploitant, d’où la vigilance de l’ordre des pharmaciens sur la rédaction des statuts et des conventions réglementées », confie Luc Fialletout.
Une arme à double tranchant.
« La SELAS peut se concevoir plus facilement en famille, les relations entre un parent et un enfant pharmaciens pouvant s’accommoder de cette liberté contractuelle, indique Gérard Martinez. Tant que le parent n’a pas cédé la totalité de ses parts, il peut conserver la maîtrise de l’officine familiale. » Ce « libéralisme » servira également à l’acquéreur principal de parts de SELAS qui désire organiser ses rapports avec un ou plusieurs repreneurs minoritaires. Cette SELAS va permettre d’aménager les conditions d’entrée et de sortie des différents associés, grâce à des clauses d’inaliénabilité, d’agrément pour toute cession d’actions, d’exclusion, de sortie ou de plafonnement des participations (sous réserve du respect des dispositions spécifiques imposées par la loi du 15 mai 2001).
Enfin, selon Hubert Mathieu, « l’utilisation du dispositif de la loi MURCEF, associé avec la possibilité de constituer une SELAS, permet de réaliser une véritable concentration du capital et d’être un outil de choix pour la constitution de chaînes ».
Principale qualité de la SELAS, sa liberté d’organisation et de fonctionnement est également son défaut majeur. Pour Luc Fialletout, « la SELAS est séduisante pour ceux qui sont prêts à s’investir dans ce domaine avec l’aide de conseils expérimentés, et catastrophique pour les autres car retirer des garde-fous va alourdir les conflits entre associés ». Attention donc aux statuts rédigés à la va-vite ! « Nous n’avons aucun recul sur la SELAS et ce n’est qu’à l’usage que l’on saura si les clauses statutaires sont conformes au droit des sociétés, souligne Hubert Mathieu. En particulier, toute clause hybride visant à réduire les pouvoirs des exploitants est contestable, le moindre litige devra se régler devant les tribunaux. » « On ne pourra avancer en terrain plus sûr qu’à la lumière des réponses jurisprudentielles et des avis du service de la législation fiscale », estime Gérard Martinez.
Hubert Mathieu souligne un autre problème propre aux SEL : « La loi impose à leurs dirigeants salariés de cotiser aux caisses de retraite professionnelles, ce qui multiplie environ par deux le poids des cotisations sociales et patronales et suppose, pour pouvoir rémunérer correctement l’exploitant, de dégager plus de bénéfices. »
LES PLUS
Grande liberté de fonctionnement.
Frais de fonctionnement moindres que la SA et formalisme restreint.
Contrôle de son actionnariat par le jeu de clauses statutaires.
Nombre d’associés réduit (au minimum deux au lieu de sept pour une SA). La SELAS peut aussi être unipersonnelle.
Transformation en SELAS facilitée pour une société existante (à condition que cette décision soit prise à l’unanimité des associés), avec un capital au minimum de 37 000 Euro(s) ; en cas d’apports en numéraire, possibilité d’en libérer la moitié, comme dans les SA.
Coût de cession réduit : droit d’enregistrement de 1 % plafonné à 3 049 Euro(s) par mutation.
Risques limités : associés, en principe, responsables des dettes sociales uniquement dans la limite de leurs apports.
LES MOINS
Liberté risquée.
Nécessité d’une étude approfondie et circonstanciée des clauses statutaires.
Obligation de nommer un président et de désigner un commissaire aux comptes.
Risque de conflits d’intérêts avec les conventions réglementées.
Recours au tribunal en cas de différend sur un point non prévu par les statuts.
Dissociation capital/droits de vote : une source de difficultés possible en matière de répartition effective des pouvoirs de décision. Les associés ne sont pas tenus par la règle de proportionnalité du droit de vote à la quotité du capital détenu.
Dirigeant et président assimilés à des salariés ; perte du statut de travailleur non salarié ; charges sociales et patronales plus lourdes.
- Comptoir officinal : optimiser l’espace sans sacrifier la relation patient
- Reishi, shiitaké, maitaké : la poussée des champignons médicinaux
- Budget de la sécu 2026 : quelles mesures concernent les pharmaciens ?
- Cancers féminins : des voies de traitements prometteuses
- Vitamine A Blache 15 000 UI/g : un remplaçant pour Vitamine A Dulcis
