Sérialisation : l’amende pourrait coûter cher à la profession

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Sérialisation : l’amende pourrait coûter cher à la profession

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Publié le 7 juillet 2020
Par Magali Clausener
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« La France est le pays le plus en retard dans la mise en œuvre de la sérialisation ». Tel est le constat de la Direction générale de la santé (DGS). Fortement inquiète de cette situation, elle a adressé fin mai un courrier aux syndicats de pharmaciens et au Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP) afin qu’ils incitent les officinaux à se lancer, enfin, dans la sérialisation. France MVO a également envoyé un mail aux officinaux début juin pour leur rappeler de se connecter à France MVS. Seule la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France a réagi, le 3 juillet, en relayant l’information et en leur proposant un guide pratique.

Pratiquement aucune pharmacie connectée

Le bilan n’est pas effectivement brillant. Actuellement, seule une douzaine de pharmacies sont connectées à France MVS et réalisent la sérialisation. Il faut dire qu’elles étaient chargées de tester le dispositif en début d’année. Depuis février 2020 (voir notre enquête : « Couacs en série pour la sérialisation » publiée dans Le Moniteur des pharmacies n° 3310 du 27 février 2020), rien n’a changé. Certes, la crise sanitaire est survenue et la sérialisation n’a pas été vraiment la priorité des pharmaciens. Mais la France était déjà en retard puisqu’elle s’était engagée à faire aboutir le chantier à la fin de l’année 2019. Et, aujourd’hui, elle se situe au dernier rang : sur les 119 730 pharmacies de l’Union européenne hors Royaume-Uni, 22 961 ne pratiquent pas la sérialisation dont 21 988 en France. « La France représente, à elle seule, 96 % des officines européennes non connectées. L’Allemagne et l’Espagne, avec un nombre total d’officines quasiment équivalent à la France (19 330  en Allemagne et 22 100 en Espagne) ont 100 % de leurs officines connectées », explique la DGS.

 

Une amende à la clé ?

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La situation est donc préoccupante. Déjà, la Commission européenne a élaboré un projet d’inspection pour vérifier la sérialisation dans les officines. La France peut en outre faire l’objet de sanction de la part de la Commission européenne. Concrètement, elle pourrait payer une amende s’élevant à des dizaines, voire des centaines de millions d’euros. Ce qui ne réjouirait guère Bercy, surtout dans le contexte actuel de crise économique. Cette amende aurait aussi des conséquences pour la profession en termes d’image, voire de monopole du médicament. Les pharmaciens pourraient finalement payer cher leur réticence à mettre en œuvre la sérialisation.

 

Se connecter via le CNOP

Pourtant, le dispositif se veut relativement simple. Les pharmaciens doivent se connecter au connecteur du CNOP et se rapprocher de leur éditeur de logiciel métier. Cinq solutions sont déjà validées : Smart-Rx, LGPI, Caduciel V6, Leo 2 et Pharmaland. La connexion est payante (44 € par an auxquels peuvent s’ajouter un forfait pour le logiciel), mais elle offre deux garanties : la sécurisation de la connexion et la pseudonymisation des données. « L'expérience des premiers utilisateurs est très positive et que les systèmes fonctionnent comme prévu, le temps de réponse sur le statut de la boîte est immédiat et le taux d’alerte correspondant aux officines est égal ou inférieur à 1 % », remarque la DGS. Et de souligner que la connexion directe à France MVS, si elle est gratuite, a été définie par l’Union européenne comme une solution de secours permettant de désactiver les boîtes de médicaments en urgence si le logiciel métier n’est plus opérationnel.

Mais pourquoi la sérialisation ?

De nombreux pharmaciens ne voient pas la nécessité de la sérialisation pour lutter contre la contrefaçon des médicaments étant donné la sécurisation de son circuit de distribution en France. « Les pharmaciens doivent réaliser que la chaîne du médicament évolue à grande vitesse. Nous avons des signaux d’alerte sur les contrefaçons de médicaments en France. La distribution internationale, les plates-formes et les possibilités de vols ouvrent aussi des brèches, détaille la DGS. Les pharmaciens français doivent offrir le même niveau de sécurité que les autres pharmaciens européens. L’officine doit rester un lieu de sécurité pour la dispensation des médicaments. En mettant en œuvre la sérialisation, ils y gagneront à terme et pourront capitaliser sur cette sécurisation y compris auprès des patients. »