Martine Magnaudeix, une consoeur de taille !

Réservé aux abonnés
Publié le 21 juin 2008
Mettre en favori

Pharmacienne et orthopédiste-orthésiste à Montpellier, Martine Magnaudeix a développé son rayon orthopédie en se spécialisant sur la contention. Pour elle, les deux activités sont indissociables.

Lorsqu’elle rejoint la Pharmacie La Populaire de Montpellier, Martine Magnaudeix en devient la responsable du secteur orthopédie. Indépendamment de l’officine, une SARL (Carrefour de santé) est consacrée à l’orthopédie et l’acoustique. Sur un étage de 150 m2, la contention veineuse y figure en bonne place (bas, collants, chaussettes, panties…) avec pas moins de 6 marques, de nombreux modèles, un large choix de motifs et de couleurs, les nouveautés… Cinq personnes y travaillent : une pharmacienne orthopédiste, deux orthopédistes-orthésistes, un préparateur et une audioprothésiste. « La contention ne se distribue pas. Elle nécessite de respecter de nombreuses règles lors de sa délivrance, car si la contention veineuse est efficace, elle peut aussi s’avérer redoutable lorsqu’elle est mal appliquée », insiste Martine Magnaudeix. Ainsi, même pour une morphologie courante, vendre un bas de contention nécessite de prendre des mesures, de montrer comment l’enfiler, bien conseiller… Ne pas donner la bonne taille revient, selon la pharmacienne, à vendre un médicament qui ne serait pas à la bonne posologie. « J’ai reçu des patients à qui l’on avait donné une taille 4 au lieu d’une taille 2. C’est comme s’ils ne portaient rien… »

Elle conçoit son propre tableau de taillage

Dès son arrivée à Montpellier, pour développer son activité de contention, la pharmacienne a pris contact avec le Pr Jambon, un angiologue ayant une vacation à l’hôpital et qui travaillait avec un kinésithérapeute. En tant qu’orthopédiste-orthésiste, elle réussit à intégrer son équipe. N’étant pas titulaire, elle peut exercer en tant que tel hors de l’officine. « Tout a découlé de ce travail d’équipe », explique-t-elle. Lors des consultations pluridisciplinaires auxquelles elle participe à l’hôpital, la pharmacienne se heurte à de nombreux problèmes d’adaptation en lymphologie. « Les pathologies sont très différentes. Il y a des morphologies atypiques pour lesquelles le sur mesure est nécessaire. C’est là que le lien entre la podologie et le retour veineux a pris tout son sens. »

A l’officine, Martine Magnaudeix passe beaucoup de temps à trouver le fabricant de contention correspondant à la morphologie de ses clients. Pour se faciliter la tâche, elle décide d’ouvrir les catalogues de tous les fabricants et d’étudier leurs produits jusque dans les moindres détails. Un travail de longue haleine qui aboutit à un comparatif très précis de tous les laboratoires avec lesquels la pharmacienne est en relation. Sur ce tableau de taillage, les fabricants sont identifiés par des couleurs, leurs produits sont déclinés dans toutes les tailles et les longueurs, leurs spécificités sont précisées. En effet, pour une même taille, des fabricants tiennent compte de certaines variations, par exemple des cuisses plus fortes. « Il n’existe pas de marque proposant un collant universel. Chaque fabricant possède ses propres caractéristiques de taillage. Il faut les connaître. Avec ma méthode, lorsqu’un patient demande un conseil ou vient pour un renouvellement, je sais très vite dans quelle marque je peux l’appareiller. »

Ce tableau permet de choisir la contention la plus adaptée pour offrir une gestion impeccable de la pression le long des membres. « Si l’on ne peut appareiller la personne en standard parce que l’on n’a rien trouvé dans les abaques des différents fabricants, alors on fait du sur mesure. » De fait, Martine Magnaudeix reçoit de plus en plus de monde en lymphologie. Les médecins ont pris acte de sa spécialisation. « Je suis ici 60 à 70 heures par semaine », reconnaît la pharmacienne. Lorsqu’elle reçoit un patient qui ne porte pas sa contention, elle en cherche la raison : difficultés à la mettre, effet garrot, marques au niveau du cou-de-pied… « Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi : il suffit d’écouter. Ces problèmes se résolvent dès lors que l’on fait de la délivrance et non de la distribution. » De fait, en 2007, son équipe a délivré 6 000 paires de bas en standard (chaussettes et contention).

Publicité

Avec l’équipe de l’hôpital Saint-Eloi, la pharmacienne a également participé à l’élaboration de produits, par exemple lorsque le fabricant Thuasne a sorti Lymphology, une nouvelle référence plus efficace grâce à un tissage et des fils différents. « Nous avons réalisé beaucoup de prises de mesures sur des patients à qui nous avons donné gratuitement des bas pour qu’ils les essaient », raconte Martine Magnaudeix. Pour Thuasne encore, elle a participé à l’élaboration d’un autre produit, le Mobiderm. Le projet a permis de sortir en juillet 2007 un bandage très efficace sur la fibrose et l’oedème lymphatique. « Je vais à l’hôpital avec mon expérience d’orthopédiste, mais aussi mon vécu et ma sensibilité car l’approche psychologique est nécessaire. C’est aussi un aspect du métier qui me passionne. »

Pharmacien référent de la Société française de lymphologie

Martine Magnaudeix a déposé son tableau comparatif à l’Institut national de la propriété industrielle en 2006. La même année, elle l’a présenté lors d’une rencontre organisée par la Société française de lymphologie (SFL) à Montpellier sur les « innovations thérapeutiques en pathologie lymphatique ». La SFL lui a alors proposé de devenir son pharmacien référent. En mars 2008, elle a ainsi participé en tant que tel à une conférence sur la lymphologie lors d’un congrès du Collège français de pathologie vasculaire. Un fabricant l’a par ailleurs sollicitée pour présenter son travail au cours du Congrès des orthopédistes-orthésistes.

Martine Magnaudeix rêve de faire de la formation. Malheureusement, ce sont pour l’instant les laboratoires qui s’en chargent dans les DU d’orthopédie. La pharmacienne se rend tout de même tous les ans à la faculté de médecine où elle anime des ateliers qui lui permettent de transmettre sa méthode de travail aux étudiants en DU de lymphologie, DU ouvert aux kinésithérapeutes et aux angiologues. Elle aimerait qu’il accueille un jour les pharmaciens. « C’est par la contention que j’ai développé l’orthopédie. Preuve que l’on peut potentialiser nos actes dans l’intérêt du patient, développer l’aspect professionnel du métier, montrer surtout sa complémentarité avec les équipes médicales. »

Envie d’essayer ?

Les avantages

– La contention attire beaucoup de monde à l’officine et permet de fidéliser une clientèle.

– Elle permet aussi d’être reconnu, tant par les médecins que par les patients.

– Elle met en lien avec l’hôpital.

– Travailler sérieusement sur ce secteur pousse à s’entourer de collaborateurs qualifiés.

Les difficultés

– Aucune, sinon le temps que nécessite un tel investissement !

Les conseils de Martine Magnaudeix

– « Choisissez au moins deux laboratoires fabricants qui peuvent se compléter en termes de prix ou de taillage. »

– « Valorisez les produits. »

– « N’hésitez pas à sélectionner du basique et des produits qui seront vendus au prix du remboursement, mais aussi des produits plus chers qui peuvent être acceptés par le patient sans aucun problème (le patient prend soin des bas qu’il a payés). »

– « Faites connaître ce service. »