Variole du singe : les traitements recommandés

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Variole du singe : les traitements recommandés

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Publié le 31 mai 2022
Par Anne-Hélène Collin
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Le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a été saisi pour émettre des recommandations sur les traitements contre la variole du singe (monkeypox). Sont préconisés des antiviraux et des immunoglobulines humaines. Si, pour cette épidémie, les autorités sanitaires disposent déjà de traitements avec AMM, très peu ont été évalués chez l’homme.

Dans son avis du 24 mai, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) fait un état des lieux des traitements disponibles contre la variole du singe (monkeypox) et émet ses recommandations. La Haute Autorité de santé (HAS) avait, elle, émis des recommandations sur les vaccins antivarioliques.

Les antiviraux sont à favoriser. En première intention, le HCSP recommande le tecovirimat, qui inhibe l’activité de la protéine VP37, présente à la surface des orthopoxvirus dont le virus monkeypox. Il dispose d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne dans des circonstances exceptionnelles depuis janvier 2022 dans le traitement des infections virales contre la variole (smallpox), la variole du singe (monkeypox), la vaccine (virus cowpox) chez les adultes et les enfants pesant au moins 13 kg. A ce jour, il n’existe pas de données d’efficacité chez l’homme dans les orthopoxviroses, en dehors de quelques observations isolées de variole. En effet, la variole du singe et la variole bovine étant éradiquées ou survenant de manière sporadique dans l’UE, il n’a pas été possible de réaliser des études en vue d’évaluer l’efficacité du tecovirimat chez des personnes infectées. L’efficacité du tecovirimat a donc été évaluée sur la base d’études menées chez des animaux. Il est également indiqué dans le traitement des complications dues à la réplication du virus de la vaccine après la vaccination antivariolique (effets indésirables rares des vaccins de première et deuxième générations contre la variole). Cette molécule n’est pas disponible à l’officine.

Le traitement doit être administré le plus tôt possible après le diagnostic, pendant 14 jours. Le tecovirimat est disponible sous forme de gélules dosées à 200 mg à administrer par voie orale La posologie, en deux prises quotidiennes recommandée chez l’adulte et l’enfant varie en fonction du poids : 200 mg/12 h pour les patients de 13 kg à moins de 25 kg ; 400 mg/12 h pour les patients de 25 kg à moins de 40 kg ; 600 mg/12 h pour les patients de 40 kg et plus. Le tecovirimat n’est pas recommandé pendant la grossesse en l’absence de données disponibles.

Les effets indésirables les plus couramment observés sont les maux de tête (qui peuvent toucher plus d’une personne sur 10) et les nausées (jusqu’à une personne sur 10).

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Le tecovirimat est un inducteur enzymatique du CYP3A4 et du CYP2B6. Il est également faible inhibiteur des cytochromes CYP2C8 et CYP2C19. Des interactions médicamenteuses avec certaines molécules (bupropion, repaglinide, voriconazole, rilpivirine, maraviroc, midazolam, atorvastatine, tacrolimus, méthadone, sildénafil, darunavir, oméprazole, lansoprazole, rabéprazole) sont donc possibles.  

Pas de traitement systématique

Le brincidofovir est à utiliser en deuxième intention « sous réserve de disponibilité », préconise le HCSP. C’est une prodrogue du cidofovir, antiviral à large spectre, analogue nucléosidique qui inhibe la synthèse d’ADN viral. Actuellement, le brincidofovir dispose d’une AMM aux Etats-Unis (Tembexa) dans le traitement de la variole (smallpox) chez l’adulte et l’enfant, y compris le nouveau-né. Il est également présent en Europe comme médicament orphelin dans la variole (smallpax), mais aussi dans l’infection par l’adénovirus chez des patients immunodéprimés. Disponible par voie orale, le brincidofovir présente une meilleure tolérance rénale que le cidofovir. Il n’existe aucune donnée d’efficacité chez l’homme, et son AMM aux Etats-Unis repose sur des données d’efficacité in vitro supérieures à celle du cidofovir sur les virus de la variole.

Le cidofovir est à utiliser en troisième intension. Il est disponible en France dans le cadre d’autorisations d’accès compassionnelles pour la prise en charge d’infections à adénovirus, à BK virus, à cytomégalovirus, à herpès simplex virus ou à herpès virus humain de type 6 chez les patients immunodéprimés en situation d’impasse thérapeutique, ainsi que dans le traitement de la papillomatose laryngée et/ou respiratoire basse réfractaire au traitement chirurgical. Le cidofovir était mentionné en 2008 comme traitement curatif potentiel de la variole dans le cadre du plan Biotox. Il n’existe pas à ce jour de données d’efficacité du cidofovir chez l’homme dans les infections à orthopoxvirus. Le cidofovir possède une forte toxicité rénale (risque de tubulopathie avec syndrome de Fanconi) et hématologique (neutropénie) ainsi qu’un potentiel effet carcinogène, tératogène et reprotoxique. Autre inconvénient : il s’administre par voie injectable. Il est réservé à l’usage hospitalier.

Enfin, les immunoglobulines humaines anti-vaccine (VIG) « constituent une alternative pour des populations particulières lorsque le tecovirimat ne peut pas être utilisé : femmes enceintes, jeunes enfants avec poids de moins de 13 kg », recommande le HCSP. Ces immunoglobulines sont extraites de plasma humain de donneurs sélectionnés en bonne santé qui présentaient des taux élevés d’anticorps dirigés contre le virus de la vaccine. Elles disposent d’une AMM uniquement aux Etats-Unis.

Le HCSP recommande « de ne pas traiter systématiquement tous les cas confirmés avec un antiviral ou des immunoglobulines ».