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Trop « poly » pour être honnête ?
Un salarié polygame, l’affaire n’est pas si banale. Du moins, la nouvelle naissance annoncée à son employeur suggère cette interprétation au sein de sa direction. De là à lui refuser les congés de paternité et de naissance…
LES FAITS
Depuis mai 2007, M. Z. conduit un poids lourd de la société à responsabilité limitée (Sarl) TO. Courant 2017, M. Z. informe son entreprise de la naissance d’un enfant et indique qu’il souhaite bénéficier des congés de naissance et de paternité. En réponse, la société indique qu’il est impossible que sa conjointe ait eu un second bébé, une naissance ayant déjà été déclarée le 21 août 2017, pour laquelle il a bénéficié des congés. La Sarl TO refuse donc cette nouvelle demande. Parallèlement, elle engage à l’encontre de M. Z. une procédure de licenciement pour faute grave. M. Z. saisit les prud’hommes.
LE DÉBAT
L’article L.1132-1 et suivants du Code du travail prévoient, entre autres, qu’aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en raison de divers motifs interdits parmi lesquels figure la situation de famille, mais également l’orientation sexuelle, la situation de grossesse, le genre, l’origine, etc. La discrimination peut être directe ou indirecte quand « une disposition, un critère ou une pratique, neutre en apparence, est susceptible d’entraîner, pour l’un des motifs précités, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autres personnes ».
Le Code du travail ajoute que, dans une affaire de discrimination, le salarié doit présenter au juge les preuves du mauvais traitement. Il revient ensuite à l’employeur de démontrer que sa décision était motivée par des éléments objectifs et non discriminatoires. En l’espèce, M. Z. estimait que le refus de son employeur était justifié par une situation de prétendue polygamie. Il apportait, entre autres, des courriers dans lesquels l’employeur évoquait l’interdiction de cette situation familiale en France. Il fait valoir également qu’à compter de cette demande son employeur n’a eu de cesse de l’inciter à partir en le privant de travail, en lui imposant des congés payés ou encore en ne lui versant pas de salaire pendant son arrêt maladie. Le conseil de prud’hommes estime que le refus de la Sarl TO, ainsi que l’ensemble de son comportement laissent supposer l’existence d’une discrimination. Il condamne l’employeur à indemniser M. Z. à hauteur de 1 240 € sur ce chef et annule le licenciement. La Sarl TO forme un appel.
LA DÉCISION
La cour d’appel de Toulouse confirme la décision du conseil de prud’hommes. Les magistrats rappellent que l’article L.3142-1 du Code du travail octroie un congé de naissance de trois jours « au père et, le cas échéant, au conjoint ou au concubin de la mère ou à la personne liée à elle par un pacte civil de solidarité ». De même, l’article L.1225-35 du Code du travail ajoute un congé de paternité de 21 jours calendaires au bénéfice du père et, éventuellement, d’une autre personne comme mentionné dans le précédent article. Dès lors, les juges confirment qu’il est possible que deux hommes bénéficient de ces congés : le père biologique et le conjoint ou concubin de la mère. Ils estiment que le refus de la Sarl TO justifié par une potentielle polygamie est fondé sur des critères moraux discriminants. Ils annulent également le licenciement de M. Z. Ces conditions s’appliquent de la même façon aux salariés de l’officine.
Source : CA Toulouse, 16 décembre 2022, n° 21/01896.
À RETENIR
Les congés de naissance et de paternité sont ouverts au père et, le cas échéant, au conjoint ou au concubin de la mère ou à la personne liée à elle par un pacte civil de solidarité.
L’employeur qui refuse le bénéfice de ces congés pour un motif de polygamie commet une discrimination.
En cas de litige fondé sur une discrimination, il revient à l’employeur de démontrer que sa décision est justifiée par des raisons objectives.
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