Dormir à son poste de travail n’est pas forcément une faute

Réservé aux abonnés
Publié le 29 avril 2017
Par Anne-Charlotte Navarro
Mettre en favori

Lorsqu’un salarié s’endort à son poste de travail, l’employeur peut être tenté de considérer cette attitude comme une faute. Mais pour justifier un licenciement, le planning doit avoir scrupuleusement respecté la durée maximale du temps de travail.

LES FAITS

Le 13 juillet 1987, Monsieur X. est engagé par la société SF en qualité d’agent de sécurité mobile. Le 1er août 2013, il est licencié pour faute grave, au motif que le 16 juillet 2013, il s’est endormi à son poste de travail dans les locaux de l’entreprise cliente. Son planning prévoyait 72 heures de travail du mercredi 10 juillet au mardi 16 juillet 2013. Il justifie son sommeil à son poste par son emploi du temps, qui selon lui ne respectait pas le temps maximal de travail. Il conteste son licenciement.

LE DÉBAT

L’article L3121-20 du Code du travail dispose que « la durée hebdomadaire de travail par salarié ne peut pas dépasser 48 heures au cours d’une même semaine ». L’article L3121-35 du Code du travail qui affirme que « la semaine débute le lundi à 0 heure et se termine le dimanche à 24 heures, sauf dispositions conventionnelles particulières ». L’employeur estime avoir respecté strictement ces dispositions. La société SF souligne que Monsieur X. n’avait pas réalisé 72 heures au cours d’une même semaine calendaire, mais de deux semaines calendaires. Dès lors, la société SF estime que l’attitude de Monsieur X. lui a fait subir un préjudice. D’un point de vue financier, puisqu’elle se trouvait en période de renégociation de contrat avec l’entreprise cliente, et en termes d’image de marque. Ces préjudices justifiaient le licenciement du salarié pour faute grave. Monsieur X. demande aux magistrats l’application de la directive européenne du 23 novembre 2009 plutôt que le droit national. Il considère que ce texte interdit au salarié de travailler plus de 48 heures sur une quelconque période de sept jours, qu’elle corresponde à une semaine calendaire (du lundi au dimanche) ou non. Il considère que son employeur ne pouvait pas lui reprocher une faute, car son endormissement est dû à un planning ne respectant pas les dispositions légales.

LA DÉCISION

Le 7 mars 2017, la Cour d’appel de Colmar(Haut-Rhin) accueille les arguments de Monsieur X., en déclarant son licenciement sans cause réelle et sérieuse. La cour rappelle qu’il appartient à l’employeur de démontrer qu’il a respecté les seuils et plafonds prévus par le droit de l’Union européenne. Les magistrats décident d’appliquer les seuils européens car ils ont pour but de préserver la santé du travailleur. Ainsi, un salarié ne doit donc pas travailler plus de 48 heures sur une période de sept jours. Dès lors, puisque l’employeur a méconnu les limites maximales de la durée du travail hebdomadaire, il n’est pas fondé à en imputer les conséquences au salarié.

Publicité
  • Cour d’appel de Colmar (Haut-Rhin), le 7 mars 2017, n°15/03621.

À RETENIR


• Un salarié ne peut pas travailler plus de 48 heures sur une quelconque période de 7 jours consécutifs.

• L’article 13 de la Convention collective impose le respect d’un repos hebdomadaire d’un jour et demi consécutif, dont une demi-journée accolée au dimanche, même en période de garde.

• Les effets de la fatigue du salarié ne constituent pas une faute justifiant le licenciement si son planning ne respecte pas la durée maximale du travail et les dispositions de la Convention collective.